REDD quitte les forêts pour envahir les paysages: la même chose, en plus grand et avec plus de chances de faire des dégâts

À la fin des années 1980, la FAO et la Banque Mondiale lançaient leur premier grand programme pour freiner la disparition des forêts : le Plan d’action forestier tropical (TFAP d’après l’anglais). En 1990, un rapport du WRM concluait que « le Plan d’action forestier tropical est voué à l’échec. Au lieu de freiner la disparition des forêts, le Plan va accélérer le déboisement ». Cette analyse faite il y a près de 24 ans serait applicable, avec très peu de modifications, à REDD, REDD+ et, bientôt sans doute, à REDD à l’échelle du paysage. Cette dernière approche essaie d’inclure les forêts et l’agriculture, et elle est aussi directive et condescendante à l’égard des communautés tributaires des forêts, et aussi favorable aux associations d’entreprises agricoles et forestières que le Plan d’action forestier tropical de la FAO et de la Banque Mondiale ne le fut dans les années 1980. Le déboisement et les émissions qui en découlent vont continuer et, pendant ce temps, le système REDD appliqué aux paysages causera beaucoup de dégâts, tout en diffamant les communautés qui dépendent des forêts et ceux qui produisent la plupart des aliments du monde : les petits agriculteurs. Or, cela ne serait pas ainsi si les gouvernements s’efforçaient plutôt de laisser les combustibles fossiles dans le sous-sol et de se détourner progressivement de l’agriculture industrielle, cause de la plupart des émissions dues à l’exploitation des terres. REDD est le paravent qui permet de dissimuler l’inaction concernant ces deux problèmes pressants.

Depuis le sommet climatique de 2007 à Bali, en Indonésie, les négociateurs de l’ONU discutent de la manière de réduire la disparition des forêts ou, plus précisément, de réduire les émissions causées par la destruction des forêts, en appliquant un système dénommé REDD, Réduction des Emissions dues au Déboisement et à la Dégradation des forêts (voir la section sur REDD du WRM, et le document « 10 alertes sur REDD à l’intention des communautés ») dans le site web du WRM). REDD est vite devenu REDD+, et les négociateurs parlaient non seulement d’éviter la perte de forêts mais aussi de « la conservation, la gestion durable des forêts et l’augmentation des stocks de carbone des forêts dans les pays en développement », autrement dit, de l’inclusion de l’exploitation forestière et des plantations industrielles d’arbres dans toute source future de revenus générés par le commerce du carbone. Pendant que se déroulaient les pourparlers à l’ONU, des centaines de millions d’euros ont commencé à être dépensés en consultants qui préparaient des méthodologies, en entrepreneurs et ONG écologistes qui formulaient des plans, des initiatives et des projets-modèle REDD, tandis que d’autres consultants certifiaient que les méthodologies développées par les premiers étaient appliquées. Quand les vendeurs des projets REDD arrivaient dans la forêt, les communautés forestières et les peuples indigènes recevaient beaucoup de promesses de bénéfices et d’emplois, mais obtenaient surtout des harcèlements, des restrictions sur l’utilisation de la terre dont ils tiraient leur subsistance et l’accusation d’être responsables du déboisement. Tandis que ceux qui utilisaient la forêt de façon traditionnelle, et la défendaient souvent contre la destruction venue de l’extérieur, étaient diffamés, les causes véritables de la disparition des forêts restaient inchangées, et les émissions continuaient sans relâche. Cette situation a été documentée dans un grand nombre de rapports (on en trouve une sélection dans le site web du WRM).

Il n’est pas surprenant que le déboisement continu, malgré la quantité d’argent et de paroles qui ont été dépensés sur REDD. Étant centré sur les émissions, le système REDD a détourné l’attention des causes directes et profondes du déboisement : la violation des droits fonciers des peuples des forêts et de leur droit à utiliser la terre de façon traditionnelle, l’agriculture industrielle et la monoculture, l’élevage, l’exploitation forestière commerciale, l’extraction de minéraux, de pétrole et de gaz, les grands projets d’infrastructure (1) et le modèle de développement qui y est associé et qui dépend d’une consommation toujours plus forte. Au cours d’un séminaire international sur le thème « La mise en œuvre de REDD+ et la gestion durable des forêts », organisé début 2014à Tokyo, au Japon, Donna Lee, autrefois principale négociatrice des USA sur REDD, a mentionné l’exemple d’un pays qui « a dépensé plus de US$50 millions pour utiliser des techniques sophistiquées de détection à distance [...] afin d’obtenir des données très précises sur les modifications du paysage ; il a dépensé beaucoup d’argent en évaluations du carbone. [...] Pourtant, ils ne savaient vraiment pas ce qu’ils allaient faire pour réduire réellement les émissions [dues au déboisement] ». (2) Dans un important rapport sur REDD, le Centre international de recherche sur les forêts (CIFOR) a conclu que les initiatives REDD+ qui visent à diminuer la disparition des forêts « se heurtent à de graves inconvénients dont les causes profondes se trouvent à l’extérieur des frontières du projet ». (3)

Il y a environ 16 ans, dans l’initiative sur les Causes profondes du Groupe intergouvernemental sur les forêts (GIF) de l’ONU, beaucoup de ces mêmes gouvernements qui discutent maintenant sur REDD dans les réunions de l’ONU sur le climat s’étaient déjà engagés, entre autres choses, à « conduire des études diagnostiques pour analyser les causes historiques profondes du déboisement et de la dégradation des forêts, notamment les effets de la pollution transfrontière, de la pauvreté, de l’utilisation de bois de feu et de processus extérieurs au secteur forestier. » (4) Dans le paragraphe 29c des Propositions d’action du GIF concernant la jouissance de la terre et le partage des avantages, les gouvernements étaient convenus de « Élaborer et mettre en œuvre des politiques et mécanismes appropriés pour garantir aux communautés locales et aux peuples indigènes la jouissance des terres, et promouvoir le partage juste et équitable des avantages dérivés des forêts. » Beaucoup d’ONG et de gouvernements ont préparé des études approfondies sur les facteurs déterminants de la disparition des forêts, mais les politiques gouvernementales visant à garantir aux communautés locales et aux peuples indigènes la jouissance des terres se sont rarement dépassé traduites par des faits. Dans son rapport de 2000 à la Commission du développement durable de l’ONU, le Forum intergouvernemental sur les forêts (FIF) (5) avait présenté les décisions prises à sa quatrième session. Rédigé à partir des conclusions d’un atelier mondial de cinq jours sur les Causes profondes du déboisement et de la dégradation des forêts, organisé en janvier 1999 et accueilli par le gouvernement du Costa Rica, le rapport disait : « Afin de surmonter les principaux obstacles rencontrés lorsqu’on cherche à remédier aux causes profondes du déboisement et de la dégradation des forêts, le Forum a souligné la nécessité de veiller à la cohérence des politiques appliquées dans le secteur forestier et les autres secteurs. Il a aussi souligné la nécessité d’une coordination efficace des politiques visant à remédier aux causes profondes du déboisement, qui souvent sont interdépendantes et ont un caractère socio-économique, notamment la  pauvreté, l’insécurité de la propriété foncière, la non-reconnaissance des droits et des besoins des peuples autochtones et des communautés locales tributaires des forêts dans les lois et les réglementations nationales, l’insuffisance des politiques transectorielles, la sous-évaluation des produits et services forestiers, le manque de participation, les problèmes de gestion des affaires publiques, l’absence d’un climat économique favorable à une gestion durable des forêts, le commerce illégal, l’insuffisance des capacités, l’absence d’un cadre institutionnel favorable à l’échelon national et international, et les politiques nationales qui faussent les marchés et encouragent la réaffectation des forêts à d’autres utilisations, notamment dans les zones à faible couvert forestier. Il a noté en outre que les causes profondes du déboisement et de la dégradation des forêts, ainsi que les moyens à mettre en œuvre pour y remédier, sont souvent spécifiques et varient donc selon les pays. » (6)

Le fait que le système REDD ait été discuté dans les conférences climatiques de l’ONU pendant plus de cinq ans, comme si on venait de découvrir que, pour combattre le déboisement, il faut en chercher les facteurs déterminants à l’extérieur des forêts, montre que l’institution est étonnamment incapable d’apprendre.

La Banque Mondiale lance une nouvelle solution fausse

Fidèle à la démarche qui consiste à « agir sans apprendre » (alors qu’elle affirme qu’elle « apprend en agissant »), et à son « rôle de pionnier » dans la proposition de fausses solutions du changement climatique, la Banque Mondiale et des agences de l’ONU comme la FAO ont commencé à lancer un nouveau concept, celui de REDD appliqué aux paysages. L’idée est toujours la même, mais en plus grand, et elle risque de faire davantage de dégâts. Pendant quelque temps, le terme utilisé dans les pourparlers climatiques de l’ONU a été REDD++, où le second « + » indiquait qu’en plus de l’exploitation forestière et des plantations industrielles d’arbres, on allait considérer les émissions dues à l’agriculture et les bénéfices pour l’agro-industrie. Les références à l’agriculture et au changement climatique se sont multipliées, et la FAO et d’autres ont commencé à parler d’agriculture « intelligente face au climat » (voir l’article à ce sujet dans ce même bulletin et dans le site web de la FAO). La Banque Mondiale a repris le terme, en disant, par exemple, au sujet de la finance de REDD+, que « En augmentant le rendement, les cultures résistantes au climat et le piégeage de carbone, l’agriculture intelligente face au climat peut aider le monde à produire la nourriture nécessaire pour éviter la faim ». (7)

Cependant, le terme REDD++ s’est avéré trop abstrait. « Pour trop de personnes le système REDD n’est qu’un outil financier abstrait. En revanche, le paysage inclut des champs et des fermes, des éleveurs et des agriculteurs, des choses que les gens peuvent voir. Si nous leur disons que nous préservons le paysage, et que REDD n’est qu’un outil qui nous permet de payer pour le faire, ils le comprennent », a dit le ministre indonésien de l’époque, HeruPrasetyo, en décembre 2013. En juin 2012, la vice-présidente et envoyée spéciale de la Banque Mondiale pour le changement climatique, Rachel Kyte, écrivait déjà sur « Les approches par paysage du développement durable » dans son rapport sur la Journée de l’agriculture et du développement rural qui avait eu lieu pendant la conférence Rio+20, la même conférence qui avait remplacé le « développement durable » par « l’économie verte » (voir le Bulletin nº 179 du WRM). Rachel Kyte avait cité Francis Seymour, alors directeur du CIFOR, qui était présent lui aussi à la Journée de l’agriculture et du développement rural : « L’approche par paysage est une manière d’améliorer la productivité agricole et le niveau de vie rural, tout en combattant aussi ce qui menace les forêts, l’eau et la biodiversité ». Chris Lang, du REDD-Monitor, écrivit à propos de la déclaration de Seymour : « Comment expliquer l’enthousiasme du CIFOR pour les ‘paysages’? En mars 2012, le REDD-Monitor a interviewé Seymour sur de nombreux sujets. Elle n’a pas mentionné une fois le mot ‘paysage’. Quand je l’ai interrogée au sujet des Journées des forêts (8) elle n’a fait aucune allusion à la possibilité d’un changement. Dans le blog du CIFOR sur les forêts il y a 59 commentaires dans la rubrique ‘paysages’. Il est évident que le CIFOR considère ce thème comme important. Mais deux commentaires seulement avaient été écrits avant juin 2012, soit avant l’annonce de Kyte qu’il fallait ‘s’engager dans la période des paysages’ ». Comme le dit Donna Lee, ancienne négociatrice principale sur REDD pour les États-Unis, dans le séminaire international mentionné plus haut, « J’ai l’impression que les paysages durables sont la coqueluche du moment. On en parle beaucoup à la Banque Mondiale, chez les bailleurs de fonds ; tout le monde parle des paysages durables ».

En 2013, la Banque Mondiale ne se contentait plus de parler du « REDD par paysages », elle commençait aussi à financer son application sur le terrain. Lors de la réunion climatique de l’ONU tenue cette année-là à Varsovie, en Pologne, trois pays (la Norvège, le Royaume-Uni et les États-Unis) se sont engagés à verser US$280 milliards au « Fonds Biocarbone pour les Paysages Forestiers Durables ». Le Fonds Biocarbone est un partenariat public-privé, administré par la Banque Mondiale, « qui mobilise des financements pour des activités visant à fixer ou piéger le dioxyde de carbone dans les écosystèmes forestiers ou agricoles ». (9) EcosystemsMarketplace, une plateforme internet qui encourage le commerce des services des écosystèmes et l’inclusion des forêts dans les marchés du carbone, a écrit depuis la conférence climatique en Pologne : « On ne pouvait pas y échapper à Varsovie. Le ministre intérimaire indonésien, HeruPrasetyo, n’arrêtait pas d’en parler, tout comme la vice-présidente de la Banque Mondiale, Rachel Kyte. Peter Homgren, qui dirige le Centre International de Recherche sur les Forêts (CIFOR), a fabriqué autour de cette idée le Forum Mondial sur les Paysages, et les États-Unis, le Royaume-Uni et la Norvège ont lancé pour la réaliser l’Initiative pour des paysages forestiers durables. Même les négociateurs officiels réunis dans le cadre de la Convention-Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique (CCNUCC) ont consacré un atelier de deux jours à  la question. Le centre de tout est ‘l’approche à l’échelle des paysages’ pour réduire les émissions de gaz à effet de serre des champs, des fermes et des forêts ». (10) L’agriculture devenait à la mode, tandis que les forêts cessaient de l’être dans les pourparlers de l’ONU sur le climat.

Pour lancer une nouvelle tendance il faut une certaine préparation. Dans un document d’avril 2012 qui porte la mention « Brève note pour discussion extérieure », le gouvernement des États-Unis fait savoir qu’il est disposé à contribuer à un fonds dont l’objectif sera de « Faciliter la mise en œuvre de stratégies nationales REDD+ en créant l’environnement nécessaire pour fournir un grand volume de matières premières produites de façon plus durable ». Parmi les « résultats escomptés », le document mentionne, entre autres, que « La mise en œuvre de programmes de ce type bien conçus, à grande échelle et intégrés, devrait aboutir à la création d’un environnement plus apte à fournir des articles durablement produits, améliorant ainsi la situation des agriculteurs et facilitant en même temps aux entreprises l’accomplissement de leurs engagements en matière de durabilité ». Le document contient un exemple imaginaire des activités qui pourraient être soutenues par un nouveau mécanisme de financement (voir l’encadré ci-dessous). Le dernier paragraphe mérite une attention spéciale, surtout si on le considère conjointement avec l’article du présent bulletin sur la campagne de la Banque Mondiale en faveur de l’agriculture « intelligente face au climat » au Kenya, et quand on compare l’exemple imaginaire à la démarche qu’adoptera l’Initiative du Fonds Biocarbone pour les Paysages Forestiers Durables.

Un exemple de programme intégré

Agrolandia est un pays de dimensions moyennes, avec une économie très dépendante du secteur des ressources naturelles. La région de Frontería est une zone où l’agriculture est en expansion rapide ; cette expansion s’accompagne d’un taux de déboisement élevé. On y trouve aussi bien de grandes plantations que de petits propriétaires. La propriété foncière est mal définie, les concessions se superposent, et la présence du gouvernement est limitée. La stratégie REDD+ d’Agrolandia vise à résoudre le problème du déboisement associé à l’agriculture.

L’application dans cette région d’un programme intégré de subventions pour financer le déboisement évité inclurait la création d’un bureau du cadastre, l’inscription des propriétés, le recensement des concessions et l’ajustement des titres le cas échéant. La subvention pourrait soutenir l’identification et la démarcation des terres défrichées et sous-exploitées de Frontería, avec des échanges de terres pour les concessions situées à l’intérieur des forêts anciennes. De l’assistance technique serait fournie à la banque de développement rural pour la conception de prêts dans des conditions préférentielles, destinés à récompenser les producteurs qui respectent certains critères de durabilité tels que le maintien du couvert forestier. Un service d’extension agricole serait créé pour donner aux agriculteurs une formation sur l’agrosylviculture, sur les meilleures méthodes de gestion et sur les mesures de conservation. Le programme pourrait couvrir le coût différentiel que comporterait la modification du tracé d’une route prévue entre Frontería et le port, pour qu’elle ne traverse pas la forêt et ne provoque donc pas de nouveaux défrichages. Le gouvernement national pourrait recevoir du soutien pour définir un niveau de référence sub-national et un système MRV pour la région, comme étape intermédiaire vers un système national. Le gouvernement d’Agrolandia s’engagerait à créer une zone protégée nationale et à fournir le personnel nécessaire, de manière à protéger formellement la forêt qui reste dans la région et à améliorer l’application des réglementations environnementales existantes.

Un financement complémentaire pourrait provenir de l’IFC, pour aider les grandes plantations de la région à obtenir une certification et à accéder aux marchés d’exportation. L’OPIC (OverseasPrivateInvestment Corporation) pourrait financer un projet pour l’amélioration des stocks génétiques à l’intention des petits et moyens agriculteurs, leur permettant ainsi d’augmenter leurs rendements sans accroître leur empreinte agricole. La Millennium Challenge Corporation pourrait fournir des fonds pour des installations de traitement qui permettraient aux petits propriétaires d’accroître leur valeur ajoutée et d’améliorer leur niveau de vie.

Cet exemple est donné à titre purement indicatif ; les programmes pourront varier considérablement suivant le contexte du pays. Les exemples d’investissements ou de soutien ici utilisés n’impliquent aucun engagement.

 

Dans le cadre également des préparatifs du « REDD par paysages », en octobre 2013 le gouvernement de Norvège, par le biais de son Initiative pour les forêts et le climat, a convoqué à un Échange sur REDD « afin de faciliter l’apprentissage et l’échange de connaissances sur REDD+ ». De quoi allait-on parler ? « En particulier, l’Échange a permis de faciliter la discussion sur l’approche par paysage dans le cadre de REDD+, sur les chaînes d’approvisionnement importantes pour REDD+, sur le concept de REDD+ et la méthodologie pour sa mise en œuvre, sur les aspects juridictionnels, et sur les questions financières. » (11)

L’agence norvégienne de coopération pour le développement, NORAD, a financé aussi un projet dénommé « Réduction des émissions dues à toutes les utilisations des terres ». En 2013, le projet a produit un rapport intitulé « Vers une approche par paysages pour réduire les émissions », où sont documentés les enseignements et les expériences « du travail d’exploration sur les approches par paysages pour réduire les émissions, dont les résultats ont pour but d’assister les acteurs de la Réduction des émissions dues au déboisement et à la dégradation des forêts (REDD+), l’agriculture et les paysages intelligents face au climat ». (12)

 

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Le système REDD appliqué aux paysages et l’Économie Verte

« Accroître les investissements publics et privés dans la REDD+ créerait des paysages productifs, rentables et durables qui séquestreraient et stockeraient plus de carbone et qui permettraient d’améliorer les services environnementaux – le cœur de l’Économie Verte », écrit le Groupe d’experts international sur la gestion durable des ressources du PNUE sur REDD+ et l’économie verte. (13)

Les grandes entreprises dont la demande de matières premières agricoles cause des émissions massives de gaz à effet de serre dues à la perte de forêts et à l’utilisation de combustibles fossiles – et qui est en train de détruire l’agriculture paysanne, les territoires et la santé des peuples du monde – figurent parmi les plus forts promoteurs de l’application de REDD aux paysages et de l’agriculture « intelligente face au climat ». « C’est exactement le type d’initiative que nous sommes ravis de soutenir. Face à l’enjeu mondial que constitue la déforestation, il est indispensable d’inventer de nouvelles formes de partenariat public-privé », dit la Banque Mondiale en citant Paul Polman, PDG de la multinationale anglo-néerlandaise Unilever, à propos de du Fonds Biocarbone pour des Paysages Forestiers Durables.

Unilever s’est associée aussi à d’autres entreprises du secteur alimentaire dans le Forum des biens de consommation, « une collaboration de 400 détaillants, fabricants et fournisseurs de services dont les ventes combinées dépassent les US$3 billions ». L’institut de recherche brésilien IPAM mentionne Unilever comme un participant proéminent du secteur privé à un « consortium d’organisations, de tables rondes (la Table ronde sur le soja responsable, Bonsucro/sucre de canne, Table ronde sur l’huile de palme durable et, depuis peu, la Table ronde Mondiale pour la viande de bœuf durable) ». Selon l’IPAM, le consortium « vise à jeter un pont entre les tables rondes de matières premières agricoles et le financement de REDD+ », et déclare que « les synergies entre REDD+ et les normes des tables rondes montrent que REDD+ a la possibilité de contribuer à transforme le marché des matières premières agricoles ». (14) Une publication de 2014 de Forest Trends, ardent défenseur des marchés du carbone, explique que « un objectif-clé est de passer de l’amélioration de la durabilité au niveau des fermes individuelles à celui du paysage, pour réduire les coûts et améliorer l’approvisionnement et, dans la perspective de REDD+, de veiller à associer des outils de certification aux résultats de la réduction des GES ». (15) (Voir la section sur la certification du site web du WRM pour davantage d’information sur l’utilisation de cet outil pour faire avancer l’expansion des plantations industrielles aux dépens de l’agriculture artisanale et des économies rurales).

Néanmoins, un thème est absent de toutes ces initiatives : le besoin urgent de réduire la surconsommation et la monoculture industrielle, axée sur l’exportation, d’huile de palme et d’autres produits qu’Unilever et d’autres transnationales du secteur alimentaire commercialisent à l’échelon international, avec toutes les conséquences que cela comporte pour les forêts, les peuples des forêts et le climat.

Au lieu de soutenir les petits agriculteurs dont le travail alimente le monde avec moins d’un quart des terres cultivables, (16) et d’exhorter à prendre des mesures pour s’attaquer aux graves problèmes que cause ce modèle d’agriculture industrielle et de plantation d’arbres, la Banque Mondiale considère les grandes entreprises comme ses plus fortes alliées. « L’engagement et la soutien du secteur privé se trouvent au cœur du nouveau projet du Fonds biocarbone. De fait, des géants de l’agro-alimentaire et de la santé, comme Unilever, Mondelez et Bunge, pionniers d’un nouveau modèle de participation, s’impliquent largement depuis le début du projet », écrit la Banque Mondiale. (17)

À quel point REDD et l’approche par paysages sont inextricablement liés se voit aussi dans un projet de l’ONG écologiste The Nature Conservancy (TNC) financé grâce à une subvention du gouvernement de Norvège et soutenu par l’USAID, UK ProsperityFund, Mafrig, Walmart, Cargill, Amazon Fund et Ann Ray Charitable Trusts, dans le cadre d’un programme intitulé Paysages durables au Brésil et en Indonésie. Le programme pilote REDD+ de São Félix do Xingú, au Brésil, « est en train de mettre en place un modèle de développement durable à faible intensité de carbone sur plus de 9 millions d’hectares dans l’Amazonie. Ce modèle permet d’aider tous les propriétaires terriens de la municipalité à se conformer au Code forestier brésilien, et il aide les éleveurs à accroître leur production de bétail sur les pâturages existants ». (18)

Et TNC n’est pas la seule ONG favorable à l’application de REDD aux paysages au Brésil. « Les méthodes des entreprises qui concernent la biodiversité sont une bonne affaire », écrivait Conservation International (CI) au moment de lancer le rapport TEEB for Business Brazil en mars 2014. Un des partenaires du projet était Monsanto. Cette multinationale de l’agrochimie avait encouragé agressivement les plantations de soja, l’utilisation de pesticides et de semences génétiquement modifiées, et elle continue de susciter des controverses. D’après la directrice de la Responsabilité sociale et la durabilité de Monsanto au Brésil, Daniela Mariuzzo, « cette initiative s’aligne sur la mission de Monsanto d’améliorer la vie quotidienne des agriculteurs et de les aider à produire davantage, mieux et de façon durable [...] ». (19)Le rapport de CI a ceci de remarquable qu’il ne fait aucune référence aux mesures efficaces que le gouvernement du Brésil avait prises pour réduire le déboisement avant l’apparition de REDD : appliquer la loi et renforcer les organes compétents, conditionner l’accès aux crédits agricoles au respect de la législation. REDD et d’autres initiatives comme ‘TEEB for Business Brazil’ ont créé les conditions nécessaires pour que cette approche soit remplacée par une autre, sans doute plus adaptée aux goûts des entreprises qui ont ainsi énormément profité de la déforestation. Cette nouvelle tendance a pour but « de transformer la législation environnementale en instruments commercialisables », a expliqué Pedro Moura Costa, fondateur de la bourse environnementale brésilienne BVRio (BolsaVerde Río de Janeiro) et de la société Ecosecurities. (20)

Le secteur agricole brésilien se prépare avec espoir à recevoir les nouvelles recettes que le système REDD appliqué aux paysages pourrait leur apporter. JBS, premier producteur de viande du monde, GrupoAndre Maggi, grand commerçant en soja et maïs, Marfrig, producteur mondial de protéines animales, et la filiale locale du géant de l’alimentation Bunge Ltd, participent à un programme pour la formulation de nouvelles directives pour mesurer les émissions du secteur agricole. Les avantages ? « Les entreprises qui adoptent les directives du protocole et les outils pour la comptabilisation des GES [gaz à effet de serre]auront quelques avantages compétitifs. [...] Connaître les risques pour le fonctionnement et la réputation ; identifier des possibilités de réduction des émissions [...] anticiper un marché de carbone potentiel ». Au plan international, de grands commerçants en matières premières sont en train de se familiariser avec le marché du carbone, et des multinationales comme Vitol, Bunge et Shell commercialisent des crédits carbone dans le cadre du Mécanisme de développement propre, aujourd’hui dysfonctionnel. (21) MárcioNappo, responsable de la durabilité de JBS, fait de son mieux pour que le débat sur REDD-paysages et l’agriculture “intelligente face au climat” évite le problème du déboisement causé par l’expansion de la frontière agro-industrielle. Il préfère parler de ‘solutions’, en particulier de celles qui permettent à son entreprise de continuer à fonctionner comme d’habitude: « les principales discussions sur les émissions de dioxyde de carbone ne porteront pas sur le transport et la déforestation mais sur l’aménagement des sols pour l’agriculture ».« Avec l’intégration de la sylviculture, l’agriculture et l’élevage, nous produirons de la viande et des céréales dans la même propriété, profitant au maximum des sols d’une façon fortement productive et atteignant les objectifs du Code Forestier. » (22)

Au Brésil aussi, la conférence « Développement des chaînes d’approvisionnement en matières premières durables », tenue en mars 2014 aux Chutes de l’Iguazú, a réuni “de grandes entreprises des secteurs de l’élevage et du soja, des décideurs, des institutions financières, des experts en déboisement et des organisations de la société civile pour identifier les enjeux et discuter des solutions possibles pour s’orienter vers les matières premières durables qui impliquent un faible déboisement”. Le programme suggère qu’ils n’ont pas parlé de la possibilité de diminuer le commerce international de matières premières agricoles et d’encourager en revanche la souveraineté alimentaire en renforçant l’agriculture paysanne, et qu’ils ne se sont pas penchés non plus sur la manière de freiner l’expansion des plantations industrielles d’arbres et de produits agricoles qui continuent de détruire aussi bien les forêts que les moyens d’existence de ceux qui dépendent des forêts.

Parmi ceux qui participaient au système REDD, certains semblent disposés à y jeter un nouveau coup d’œil. « Nous pouvons toujours construire des modèles sophistiqués, mais au bout du compte ces communautés locales savent ce qu’il leur faut. On dirait que c’est par là qu’il faudrait commencer », a commenté Donna Lee au cours du séminaire à Tokyo que nous avons mentionné plus haut. De toute évidence, cette idée n’est parvenue aux architectes du REDD par paysages de la Banque Mondiale et d’ailleurs. L’idée de REDD par paysages qu’ils sont en train de mettre en place appliquera le même modèle et partira des mêmes analyses erronées qu’on a déjà essayées, sans succès, par le GIF, puis le FIF, ensuite le FNUF depuis la fin des années 1990, et avant cela par la FAO et le Plan d’action pour les forêts tropicales de la Banque Mondiale (TFAP). (23) En 1990, Marcus Colchester et Larry Lohmann écrivaient à propos du TFAP : « que le Plan est voué à l’échec. Au lieu de freiner la disparition des forêts, le plan va accélérer le déboisement ». Cette analyse d’il y a 24 ans serait applicable, avec très peu de modifications, à REDD, REDD+ et, bientôt probablement, à REDD-paysages.

Les résultats du système REDD appliqué aux paysages risquent donc de ne pas différer beaucoup de ceux du TFAP ou de REDD. La démarche est aussi directive et condescendante à l’égard des communautés forestières, aussi favorable aux associations d’entreprises agricoles et forestières que le Plan d’action de la FAO et de la Banque Mondiale des années 1980. La déforestation et les émissions qui en découlent vont continuer et elles vont beaucoup nuire aux communautés tributaires des forêts et à ceux qui fournissent les aliments de base qui nourrissent le monde : les petits agriculteurs.

Quelles en seront les conséquences pour les petits agriculteurs ? Probablement les mêmes que subissent les communautés tributaires des forêts et de l’agriculture itinérante dans le cas de REDD : les promesses de bénéfices se transformeront en conditions de production encore plus précaires et l’agriculture paysanne sera diffamée, tandis que les grandes entreprises agro-industrielles accuseront de tout ceux qui se trouvent à la base de la chaîne de production et que leurs partenaires biotechnologiques proposeront des semences génétiquement modifiées (GM) appropriées pour l’agriculture sans labourage « intelligente face au climat » (voir l’article de ce bulletin sur l’agriculture « climato-intelligente »).

Les répercussions pourront se faire sentir aussi sur les politiques concernant l’affectation des terres, comme le montre le cas du Code forestier brésilien. Gerson Teixeira, ancien président de l’Association brésilienne pour la réforme agraire, a dit que l’introduction des crédits commercialisables de restauration des forêts tels que prévus dans le Code forestier révisé de 2012 mettrait en danger la réforme agraire du Brésil. L’instrument historique de la réforme agraire a été l’expropriation des latifundiums dont on pouvait prouver qu’ils étaient improductifs et qui, par conséquent, n’accomplissaient la fonction sociale que la constitution prévoit pour la terre. L’introduction des crédits commercialisables de restauration des forêts a créé un instrument qui pourrait éviter cette expropriation, parce que ces crédits transformeraient les propriétés improductives en fabriques de carbone et en dépôts de réserves écologiques. Les propriétaires terriens pourraient à leur tour affirmer que leur terre accomplit la fonction de production requise par la constitution. « La possibilité d’acheter des crédits carbone transformera les latifundiums improductifs en ‘fabriques de carbone’. » (24) Le système REDD appliqué aux paysages et l’agriculture « intelligente face au climat » vont saper encore plus le processus brésilien de la réforme agraire – déjà soumis à de fortes pressions par les intérêts agro-industriels – dans les forêts extérieures où le Code forestier n’est pas applicable.

Les problèmes sont connus, les solutions existent... mais elles sont très différentes de ce que propose la Banque Mondiale avec son concept de REDD à l’échelle du paysage

« Transformer les champs de nos paysans en puits de carbone, dont les droits peuvent être vendus sur le marché du carbone, nous éloignera encore de ce qui pour nous est la véritable solution, c’est-à-dire la souveraineté alimentaire. Le carbone de nos fermes n’est pas à vendre ! », voilà ce qu’a écrit La VíaCampesina quand les gouvernements et les lobbyistes des transnationales se sont réunis à Varsovie, Pologne, pour discuter de REDD appliqué aux paysages et de l’agriculture « intelligente face au climat ». (25) Bien que l’agriculture soit l’un des principaux responsables du changement climatique, tous ceux qui cultivent des produits alimentaires n’en sont pas responsables au même degré. C’est le système alimentaire industriel, et non l’agriculture itinérante et paysanne, qui est à l’origine des émissions de gaz à effet de serre (26), car il utilise de grands volumes de produits chimiques, provoque l’érosion du sol et le déboisement dont s’accompagne la plantation en régime de monoculture, et renforce la tendance à approvisionner les marchés d’exportation (voir l’article du Bulletin 173 du WRM). En revanche, l’agriculture paysanne et l’agro-écologie, qui se centrent sur la souveraineté alimentaire, sont déjà en train de prouver qu’il est possible de « nourrir le monde » en produisant beaucoup moins d’émissions que l’agriculture industrielle pour l’exportation. Pat Mooney, de l’ETC Group, résume ainsi les raisons pour lesquelles le système REDD par paysages et l’agriculture intelligente face au climat n’ont pas grand-chose à offrir et comportent de gros risques pour l’agriculture paysanne : « Pour les petits agriculteurs du monde, cela n’a rien d’intelligent. Ce n’est qu’un nouveau moyen de faire entrer dans leurs champs des technologies contrôlées par les transnationales, et de leur voler leur terre ».

 

JuttaKill, jutta@wrm.org.uy

World RainforestMovement

 

Références:

(1) Sur le rôle des infrastructures dans la destruction des forêts, voir le Bulletin nº 203 de juin 2014 du WRM, http://wrm.org.uy

(2) http://www.ffpri.affrc.go.jp/redd-rdc/en/seminars/reports/2014/02/06/01.html#programnew

(3) W. Sunderlin et d’autres (2014) : The Challenge of Establishing REDD+ on the Ground: Insights from 23 Subnational Initiatives in Six Countries. http://www.cifor.org/library/4491/the-challenge-of-establishing-redd-on-the-ground-insights-from-23-subnational-initiatives-in-six-countries/

(4) Propositions d’action du GIF, propositions 27a et 27b, voir http://wrm.org.uy/oldsite/deforestation/UC.html

(5) Pendant ce temps, le GIF était devenu le Forum intergouvernemental sur les forêts (FIF) et, plus tard, son nom serait remplacé par celui de Forum des Nations unies sur les forêts (FNUF). Son efficacité à combattre la perte de forêts reste douteuse, comme le démontre la disparition continuelle de grandes étendues de forêts dans le monde entier.

(6) Rapport de la Quatrième session du Forum intergouvernemental sur les forêts (E/CN.17/2000/14), http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N00/351/79/PDF/N0035179.pdf?OpenElement

(7) http://www.worldbank.org/climatechange

(8) Le CIFOR organise depuis 2007 une rencontre annuelle dénommée ‘Journées des forêts’ pendant le week-end qui sépare les deux conférences de l’ONU sur le climat. En 2013, le nouveau directeur du CIFOR, Peter Holmgren (qui appartenait auparavant à la FAO) a rebaptisé ces « Journées des forêts », les appelant « Journées des paysages ».

(9) http://www.banquemondiale.org/fr/news/feature/2013/11/20/biocarbon-fund-initiative-promote-sustainable-forest-landscapes?cid=EXT_Twitterbanquemondiale_P_EXT

(10) http://www.landscapes.org/can-unfccc-accommodate-landscapes-views-warsaw/#.U8rjFfmSwf0

(11) http://climate-l.iisd.org/news/redd-exchange-discusses-landscape-approach-highlights-norways-engagement/

(12) http://www.asb.cgiar.org/report/towards-landscape-approach-reducing-emissions-substantive-report-reducing-emissions-all-lan-0

(13) http://www.un-redd.org/portals/15/documents/IRPBuildingNationalCapitalREDDSummaryFR.pdf

(14) Amazon EnvironmentalResearch Institute (IPAM) (2013): Financing of improved agricultural production canreduceforestlosses. Draft. www.norad.no/en/support/climate...forest-initiative.../407556?

(15) R. Edwards et d’autres, (2014) : Jurisdictional REDD+ Bonds: LeveragingPrivate Finance for Forest Protection, Development, and Sustainable Agriculture SupplyChains.

(16) GRAIN (2014)Affamés de terres: Les petits producteurs nourrissent le monde avec moins d'un quart de l’ensemble des terres agricoles. http://www.grain.org/article/entries/4960-affames-de-terres-les-petits-producteurs-nourrissent-le-monde-avec-moins-d-un-quart-de-l-ensemble-des-terres-agricoles

(17) http://www.banquemondiale.org/fr/news/feature/2013/11/20/biocarbon-fund-initiative-promote-sustainable-forest-landscapes

(18) http://www.nature.org/ourinitiatives/urgentissues/global-warming-climate-change/how-we-work/brazil-redd-fact-sheet-final.pdf

(19) http://www.institutocarbonobrasil.org.br/agricultura1/noticia=736719

(20) Pour davantage d’information sur la BVRio et le commerce de crédits de restauration des forêts selon le Code forestier brésilien de 2012, voir « Le commerce des services environnementaux : quand le ‘paiement pour services environnementaux’ équivaut à l’autorisation de détruire », http://wrm.org.uy/fr/index-par-themes/marchandisation-de-la-nature/commerce-de-services-environnementaux/

(21) http://af.reuters.com/article/commoditiesNews/idAFL6N0PK3J020140709?pageNumber=1&virtualBrandChannel=0

(22) http://www.reuters.com/article/2014/05/29/carbon-agriculture-brazil-idUSL6N0OF3GK20140529

(23) Marcus Colchester and Larry Lohmann (1990): The Tropical Forestry Action Plan: What Progress?.

(24) Gerson Teixeira (2012): Latifúndiosimprodutivosviraramfábricas de carbono. www.mst.org.br/Gerson-Teixeira-latifundios-improdutivos-viraram-fabricas-de-carbono

(25) http://www.grain.org/fr/article/entries/4813-sommet-climatique-les-paysans-refusent-de-devenir-des-marchands-de-carbone

(26) Voir, par exemple, GRAIN (2009) The international food system and the climatecrisis. http://www.grain.org/article/entries/734-the-international-food-system-and-the-climate-crisis