Swaziland: une papeterie contamine le fleuve et les gens

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Les résidents du Sud de l'Etat industriel de Matsapha, où se situe le secteur manufacturier du pays, ont récemment souffert de troubles de santé pour avoir consommé l'eau "empoisonnée" du fleuve Lusushwana. Le fleuve est propre lorsqu'il coule de la Réserve naturelle de Mantenga, mais il traverse ensuite la zone industrielle de Matsapha où, d'après les habitants qui dépendent de ce fleuve pour leurs besoins en eau, sa couleur change. "Il est marron un jour, gris le lendemain", dit Thab'sile Dlamini, habitant d'un village de fortune surgi le long des berges. Le principal de l'école primaire de Mthonjeni a rapporté des maux d'estomac généralisés chez les étudiants, quoique sans conséquences fatales. Deux tiers des Swazis vivent en dessous du seuil de pauvreté, et beaucoup d'entre eux obtiennent encore l'eau dans les ruisseaux des environs. Les résidents ont accusé de cette situation plusieurs usines installées dans la région, dont Swazi Paper Mills.

Le Service environnemental du Swaziland (SES) a été créé il y a sept ans dans l'orbite du Ministère du Tourisme, pour contrôler l'application de la législation environnementale dans un pays où la population, majoritairement paysanne, dépend de l'eau non traitée puisée directement des fleuves. Après avoir été plutôt inefficace pendant les cinq premières années de son existence, il a récemment surpris les environnementalistes lorsqu'il a menacé de fermer l'une des industries les plus anciennes du pays, après avoir découvert que des effluents chimiques produits par Swazi Paper Mills étaient déversés dans le fleuve par un canal qui traversait une usine électrique. Le directeur du SES, Jameson Vilakati, a mené une enquête dans la papeterie et reporté ensuite: "Ils n'ont rien nié, mais ils ont déclaré par contre qu'une certaine machine ne fonctionnait pas et que les déchets non-traités allaient de ce fait se déposer dans le fleuve." Vilakati a ajouté que la direction du SES allait sommer la compagnie d'arrêter toute activité jusqu'à ce que le problème des déversements ait été réglé.

Swazi Paper Mills a donc reçu le signal que l'octroi d'autorisations et l'approbation de ses projets d'expansion - pour une nouvelle usine de pâte et de copeaux de bois - dépendra dorénavant de son comportement environnemental.

"C'est une réalité nouvelle", a dit un membre du SES. "Auparavant, c'était le laisser faire. Le Swaziland voulait attirer des industries, et nous avions une quantité apparemment illimitée de terres et de fleuves, qui semblaient inépuisables. Maintenant nous sommes à court de ressources, et la conservation est donc essentielle." Malheureusement, il y a eu entre temps des fleuves pollués et des gens malades.

Comme il arrive souvent, les pollueurs sont présentés - avant les "accidents" - comme des environnementalistes, et Swazi Paper Mills n'est pas l'exception. L'annuaire 2003 des entreprises du Swaziland décrit la compagnie dans ces termes: "La responsabilité de la compagnie dans le domaine de l'environnement est un facteur clé…". Le fait qu' "une certaine machine" n'ait pas fonctionné et que les déchets non traités - des effluents fortement toxiques - aient été sciemment déversés dans le fleuve montre le sens véritable de cette "responsabilité de la compagnie", et l'importance du contrôle gouvernemental sur les activités des entreprises.

Article basé sur des informations tirées de: "Swaziland: Environment authority shows its teeth", IRIN, http://irinnews.org/report.asp?ReportID=33726; Swaziland Business Year Book 2003, http://www.swazibusiness.com/sbyb2003/index.php?f=09.