Le mécanisme REDD (Réduction des Émissions dues à la Déforestation et à la Dégradation des forêts) est un élément clé de l'Économie Verte, encore que les leçons apprises durant plus de 15 ans de son application démontrent qu´il ne lutte ni contre la déforestation comme son nom l'indique, ni contre le chaos climatique croissant (1).
Malgré tout, le mécanisme REDD est plus vivant que jamais. Avec la demande croissante de crédits carbone - en vérité, de « crédits de pollution » - de la part des entreprises polluantes et des États qui veulent atteindre une prétendue « neutralité carbone », les projets et les programmes REDD se multiplient. Pour contrer les critiques sévères, les défenseurs du REDD créent de nouvelles initiatives et de nouvelles dénominations, tels que « solutions fondées sur la nature », et ne se privent pas, également, de faire de nouvelles promesses.
C'est ce qui a lieu à Pará, le deuxième plus grand État de l'Amazonie brésilienne. Des entreprises privées et certaines ONG multiplient les projets REDD, en même temps que le gouvernement de l'État de Pará accélère la mise en œuvre de son programme REDD juridictionnel, un programme REDD à l'échelle de l'État. Le gouvernement de l'État de Pará, désireux de montrer au monde que la déforestation dans l'État appartiendra bientôt au passé, sera le siège de la conférence des Nations Unies sur le changement climatique en 2025.
L´État de Pará est l'un des États qui a le plus contribué à la déforestation au Brésil. Parmi les principaux responsables figurent l´industrie du bois, l´élevage de bétail, l´agrobusiness du soja et du maïs, les sociétés d´exploitation minière et les projets d'infrastructure tels que les autoroutes et les barrages hydroélectriques. Si le Pará était un pays, il occuperait la deuxième place parmi les pays dotés de forêts tropicales qui ont le plus déboisé au cours des dernières décennies, laissant derrière soi l'Indonésie et la République Démocratique du Congo. (2)
Mais que pouvons-nous attendre des nouvelles attaques du REDD et de l´Économie Verte au Pará ? Y aurait-il un fait nouveau capable de rompre avec l´intense déforestation qui a lieu dans l´État ?
Les projets REDD au Pará : le cas de Biofílica-Ambipar
Parmi les entreprises ayant des projets REDD au Pará, l'entreprise Biofílica se distingue par son ambition. En 2021, elle a été rachetée par la multinationale Ambipar et a reçu un nouveau nom : Biofílica Ambipar Environment. A cette occasion, la nouvelle entreprise a annoncé son intention de décupler le nombre de crédits carbone générés sur le marché volontaire pour devenir « la plus grande entreprise de solutions fondées sur la nature » au monde (3).
Il convient de noter qu'Ambipar est en relation, directe ou indirectement, avec plusieurs entreprises et secteurs impliqués dans la déforestation en Amazonie. (4) Ce n´est pas un hasard si Biofílica agit de la sorte depuis de nombreuses années. En 2010, Biofílica s'est alliée à l'un des plus grands accapareurs de terres et destructeurs de forêts au Pará : le groupe Jari. Fondé par un Américain, le groupe Jari s'est approprié, à partir de 1967, de 1,6 millions d'hectares de forêts dans l'État du Pará et dans l'État voisin de l'Amapá. Jari a détruit des dizaines de milliers d'hectares de forêts pour y planter des monocultures d'arbres comme l'eucalyptus ; il a dégradé des milliers d'hectares de forêt restante pour en extraire des bois nobles (5).
Cependant, le groupe Jari s'est vu également confronté à des dizaines de communautés traditionnelles qui y étaient déjà présentes et qui vivaient de l'extraction des noix du Brésil et d'autres richesses que la forêt leur procurait. Incapable de les déloger, Jari a décidé de les acculer et de les opprimer, en leur ôtant la liberté et le contrôle sur la forêt qu'ils conservaient jusqu´alors et avec laquelle ils avaient l'habitude de vivre.
Malgré cela, Jari a réussi à obtenir le label « vert » du FSC en 2004, devenant ainsi le propriétaire de la plus grande zone de « gestion forestière durable » du Brésil. En conséquence, le FSC a reconnu les titres de propriété foncière de Jari comme étant « légaux » et a ainsi légitimé une tentative de l'entreprise de les légaliser auprès de l'État de Pará. Le groupe Jari a fait pression sur les communautés pour qu'elles acceptent une petite parcelle des terres afin de pouvoir se tailler la part du lion (6).
En partenariat avec Biofílica, Jari a également mis en place des projets REDD, depuis 2010 dans l'Amapá et, depuis 2014, dans le Pará. Les projets REDD ont également reçu un label « vert » de la part du certificateur VCS/VERRA, pour une durée de 30 ans (7). L´argument présenté par ces projets était que sans le REDD, les « envahisseurs », y compris les communautés, seraient capables de provoquer une déforestation importante. Malgré le discours sur les « bénéfices » que les communautés en retireraient, en réalité, les projets REDD ont piégé et opprimé encore plus les communautés.
Celle qui est censée assurer ces bénéfices c´est la Fondation Jari, branche « sociale » de l´entreprise Jari. Dans l´une de ces activités, un technicien de la Fondation a débarqué dans une communauté en disant qu´il était venu enseigner les familles à planter des noix du Brésil. Or, depuis longtemps déjà il n'y avait plus de châtaigniers, Jari avait dévasté la châtaigneraie, qui était la principale source de revenus de la communauté, pour y planter de l'eucalyptus. Un villageois a dit au technicien : « Si vous êtes venu nous apprendre à planter des noix du Brésil, vous pouvez partir car, ça, nous savons le faire. Maintenant, si vous voulez nous aider, dites à Jari d'arracher cette plantation d´eucalyptus et de replanter la châtaigneraie qui a été détruite, voilà ce qui pourrait véritablement venir en aide de notre communauté. » (8)
Malgré les dénonciations d'exploitation forestière illégale et de commerce du bois par le groupe Jari et les enquêtes menées par les autorités compétentes sur l'accaparement des terres, (9) Biofílica a vendu entre 2013 et 2023 un total de 2.997.953 « crédits de pollution » provenant des projets REDD de Jari dans le Pará et l'Amapá. Partant d´une valeur sous-estimée de 5 dollars par crédit, les ventes ont dû rapporter au moins 15 millions de dollars américains, soit 75 millions de reais. (10)
Parmi les acheteurs de « crédits de pollution » figurent des entreprises directement ou indirectement impliquées dans la déforestation : des banques comme la banque brésilienne Bradesco, qui a déjà été dénoncée comme étant la principale banque finançant la déforestation en Amazonie (11) ; l'allemande Bayer, une multinationale des pesticides qui encourage, soutient et tire des bénéfices de l'expansion de l'agro-industrie du soja et d'autres monocultures (12) ; et Seara Brasil, propriété du groupe brésilien JBS, le plus grand producteur de viande au monde, tout en sachant que l'élevage de bétail, s´est fait avec l'avancée des pâturages et a été la principale cause directe de la dévastation de la forêt amazonienne. (13)
Les projets REDD de Biofílica ne sont pas seulement une « solution » permettant à ces entreprises de se présenter comme « neutres en carbone » et protectrices de l'Amazonie, mais ils servent également au groupe Jari lui-même dans la mesure où ils créent un écran de fumée sur ses crimes. (14) Un article de presse de 2023 posait la question suivante : « comment un programme de (...) carbone continue-t-il à être opérationnel plusieurs années après que l'État ait enregistré la majeure partie des terres du projet en tant que terres publiques ? » (15)
Quelles sont les nouvelles « solutions fondées sur la nature » de Biofílica-Ambipar?
L'une des nouvelles « solutions » de Biofílica-Ambipar est un partenariat avec la société Agropalma pour établir un projet REDD. Agropalma, outre qu´elle est l'un des plus grands producteurs d'huile de palme au Brésil, envisage, à partir de 2023, d'étendre ses activités à un autre secteur clé de l'économie verte : les énergies « renouvelables ». (16)
Le projet REDD d'Agropalma et de Biofílica consiste à conserver 50.159 hectares de forêts au Pará, dans les municipalités de Tailândia, Moju, Tomé-Açu et Acará. Agropalma argumente, comme Jari le fait dans ses projets REDD, que sans le projet, les communautés environnantes détruiraient la forêt, dans ce cas, 13.591 hectares sur 30 ans. Le projet vise à promouvoir des « alternatives » à la déforestation et des ateliers d'éducation environnementale qui, selon eux, amélioreront le bien-être de ces communautés (17).
Comme ça a été le cas avec le Groupe Jari, Biofílica s'allie une fois de plus à une entreprise impliquée dans le crime d'accaparement des terres. L'accaparement des terres est à l'origine de conflits fonciers avec des dizaines de communautés quilombolas et indigènes qui luttent depuis des années pour la régularisation de leurs territoires. (18) En raison de ces conflits, les communautés subissent des menaces, des violences et des persécutions (19).
Le projet REDD de Biofílica-Ambipar et Agropalma vient également renforcer la stratégie actuelle d'Agropalma qui consiste à persécuter les communautés en imposant des restrictions et des interdictions concernant l'utilisation de la forêt, actions qui font partie du projet REDD. Alors qu'ils accusent les communautés d'être responsables de la déforestation, ils espèrent empocher près de 7 millions de dollars grâce à la vente de « crédits de pollution » (20).
L'un des principaux acheteurs d'huile de palme d'Agropalma est la société américaine Cargill. Avec l'avancée du soja, Cargill, l'une des plus importantes entreprises de l´agrobusiness au monde, se voit fortement impliquée dans la déforestation au Pará et au Brésil. Au Pará, Cargill possède un port d'exportation à Santarém et prévoit d'en installer un autre à Abaetetuba. Récemment, Cargill a été poursuivie en justice aux États-Unis pour ne pas avoir mis fin à la déforestation et aux violations des droits de l'homme dans sa chaîne d'approvisionnement au Brésil (21).
Il est clair que les nouvelles « solutions » de Biofílica Ambipar Environment, telles que le partenariat avec Agropalma, s'inscrivent dans la continuité de ses projets précédents, notamment avec le Groupe Jari. Le programme REDD juridictionnel du gouvernement du Pará pourrait-il représenter une initiative nouvelle, capable de mettre fin à une déforestation importante ?
Le programme REDD juridictionnel du gouvernement de l´État de Pará : Le rôle des grandes ONGs
Le REDD juridictionnel est une version plus récente du REDD et est né en partie en tant que réponse à l´échec des projets REDD individuels qui non seulement n´ont pas réussi à réduire la déforestation mais ont causé des conflits dans les communautés. Les défenseurs du REDD juridictionnel mettent en avant l´idée que leurs programmes, du fait qu´ils s´étendent à toute une juridiction, comme un État et un pays, auraient les conditions de venir à bout des projets individuels et, de fait, réduire la déforestation.
Cependant, la principale référence du REDD juridictionnel au Brésil, dans l'Etat de l´Acre, a été un échec. Le gouvernement de l'Acre a reçu des dizaines de milliers d'euros à partir de 2012, notamment de la part du gouvernement allemand, pour le récompenser d'avoir été « pionnier » avec une loi d'Etat sur la vente de « crédits de pollution ». Mais après 11 ans et des millions d'euros transférés au gouvernement de l'Acre, on constate que l'Acre a suivi, à partir de 2018, la forte courbe ascendante du taux de déforestation des autres Etats amazoniens qui n'avaient pas de programme REDD juridictionnel. Dans le même temps, les conditions de vie des communautés qui dépendent des forêts, en particulier des femmes, se sont aggravées, comme dans la réserve extractive de Chico Mendes (RESEX).(22) Ces dernières années, la RESEX de Chico Mendes, symbole du programme REDD de l'Acre, est en train d'être détruite, transformant les forêts en pâturages.(23) Le fait que même cela n'ait pas entraîné l'annulation du financement REDD pour l'Acre montre, à tout le moins, à quel point les calculs de déforestation sont "flexibles" et "manipulables" dans ce type de programme.(24)
Une similitude importante entre le programme REDD juridictionnel de l´État d´Acre et le processus de l´État de Pará c´est le protagonisme dans la conception et la définition du fonctionnement du mécanisme REDD des grandes ONG internationales préservationnistes, ainsi que la non-participation de la population, en particulier des communautés dépendantes de la forêt, dans cette définition. L'une des premières étapes importantes vers un REDD juridictionnel dans l'État du Pará a été l'élaboration du Plan d'État Amazônia Agora, sa stratégie visant à atteindre « un modèle de développement basé sur la conservation et la valorisation des actifs environnementaux ». Ce n'est pas un hasard si le concept de Plan a été présenté lors d'un événement de l'ONG américaine The Nature Conservancy (TNC) à Madrid, loin du Pará, pendant la conférence sur le Climat de 2019. (25)
La TNC, ensemble avec d´autres ONGs comme le Forest Trends et Environmental Defense Fund, agissent comme un « bataillon de choc » pour défendre les intérêts des grandes entreprises et des banques du capital international. Il s'agit d'établir institutionnellement une économie verte afin de maintenir et multiplier les profits tirés de l'extraction du pétrole et d'autres combustibles fossiles, tout en ouvrant de nouveaux marchés "verts" afin d'accroître leurs business.
TNC a rédigé le Plan d´État de Bioéconomie de Pará (30) et a remporté l'appel d'offres pour la mise en place du cadre juridico-institutionnel du REDD juridictionnel de l'État. (31) Outre qu´il se bénéficie des ressources disponibles pour les « services de conseil », qui consomment une part importante de tous les projets et programmes REDD, il est frappant de voir comment une institution américaine, avec tous les intérêts susmentionnés qu´il y a derrière, dirige tout un processus politique sur le REDD dans l'État de Pará, au Brésil.
En outre, le gouverneur du Pará a signé une lettre d'intention en 2022 avec la coalition appelée LEAF, qui signifie, en anglais « Réduire les Émissions en Accélérant le Financement des Forêts ».
Qu´est-ce que la The Nature Conservancy (TNC) ?
Alors que de nombreuses ONGs environnementales souffrent d´une pénurie de ressources, ce n'est pas le cas de la TNC, qualifiée par le Washington Post de « groupe environnemental le plus riche du monde », avec 3 milliards de dollars d'actifs à sa disposition (27). TNC ressemble beaucoup plus à une entreprise qu'à une ONG. Par exemple, un ancien directeur de la conservation recevait un salaire annuel de 1,168 millions de dollars. (28) En outre, intègrent le Conseil Mondial de l'organisation, des représentants de certaines des principales institutions du capital financier international, telles que JP Morgan Chase et Goldman Sachs. Un rapport qui calcule les investissements en combustibles fossiles après l'Accord de Paris a souligné qu´ « une conclusion incontournable de ce rapport est que JP Morgan Chase est clairement la pire banque au monde en matière de changement climatique. » Cela ne fait que confirmer que TNC est fortement liée aux intérêts de l'industrie de l'extraction pétrolière qui, à son tour, est un investisseur majeur dans le REDD (29).
Qu´est-ce que la LEAF ?
La coalition LEAF a été créée en 1921 et se projette comme le « plus grand effort public-privé de tous les temps pour protéger les forêts tropicales » ; elle compte avec le financement de 1 milliard de dollars en provenance d´entreprises privées et des gouvernements d´Allemagne, de la Norvège et des États-Unis. (32) Parmi ses participants se trouvent certains des principaux acteurs qui poussent à la déforestation au Brésil, comme Nestlé, Unilever et Bayer. Mais non seulement, dans la liste des bailleurs de fonds apparait aussi la société Blackrock, l'un des plus grands investisseurs mondiaux en compagnies pétrolières, y compris dans les sables bitumineux, l'une des formes d'extraction les plus destructrices de la planète. Dans ce contexte, Blackrock a elle-même admis qu'elle souhaitait « voir ces compagnies [pétrolières] réussir et prospérer ». (33) Ironiquement, la Guyane, le premier pays à signer un contrat avec le LEAF, est en train de créer des « crédits de pollution » pour les nouvelles extractions pétrolières au large de ses côtes. Cela montre que la LEAF suit exactement la même logique que le REDD, en donnant aux pollueurs le "droit de polluer" et en accélérant le chaos climatique.
La mise en œuvre du Plan d'Etat Amazônia Agora au Pará sera de la responsabilité du Secrétariat d'Etat à l'Environnement, celui-là même qui, en théorie, devrait lutter contre la déforestation et autres actions nuisibles à l'environnement. Mais les engagements pris restent vagues et contrastent avec la réalité, comme le constate et le dénonce un groupe d'organisations sociales dans une lettre ouverte : « D´année en année, l'État investit et approuve des projets dont les impacts socio-environnementaux mettent en péril la survie même du biome amazonien, de ses peuples indigènes et de ses communautés traditionnelles ». Les entités mentionnent le projet Volta Grande, qui promet d'être la plus grande mine d'or à ciel ouvert dans une région qui connaît un effondrement socio-environnemental, dû, entre autres, aux impacts de la construction du barrage hydroélectrique de Belo Monte. Malgré une forte résistance, l'État du Pará fait pression pour que ce projet minier soit rapidement mis en œuvre (34).
Le gouvernement du Pará semble également vouloir transformer l´État, à l'instar de la Guyane, en une nouvelle frontière pour l'expansion pétrolière. La société brésilienne Petrobras envisage d'extraire du pétrole à l'embouchure du fleuve Amazone, au large des côtes d'Amapá et de Pará. Alors que des dizaines d'entités environnementales, à l'exception de TNC et de ses organisations alliées, ont envoyé une lettre de protestation contre la proposition (35), le Gouverneur du Pará, Helder Barbalho, a déclaré qu´ « empêcher le Brésil d´aller à la recherche de ses atouts, que ce soit dans le domaine de l'environnement ou dans d'autres activités, est un pas en arrière (...) » (36).
Changer pour ne rien changer
Afin d´arrêter le processus de déforestation il faut faire preuve de volonté politique. L´ampleur de cette volonté peut être inversement mesurée par l'avancée de nouveaux accords commerciaux sur l'exportation de produits de base brésiliens, ou par la récente commémoration, par le gouvernement brésilien, autour de l'augmentation du PIB en 2023 en raison du « résultat exceptionnel » de l'agrobusiness. Ce « résultat » est surtout lié à l'expansion de la culture du soja, en particulier dans les zones de pâturage, c'est-à-dire dans les zones où la déforestation a progressé. (37)
Cet article montre comment le mécanisme REDD et l'économie verte en général sont des outils qui visent non seulement à maintenir et à étendre l'extraction et la combustion du pétrole, mais à préserver la pratique de la déforestation. Leurs propositions sont pensées dans le Nord Global et gardent de fortes caractéristiques néocoloniales parce qu'elles représentent plus d'appropriation et de contrôle des territoires et, par conséquent, plus d'oppression, afin que des entreprises comme Cargill, Unilever, Bayer, Blackrock, entre autres, puissent en tirer plus de profit. Il s'agit de changer pour ne rien changer. Pour ces entreprises, l'économie verte est synonyme de conquête de nouvelles affaires et de nouveaux marchés.
Aujourd'hui, les ONG conservationnistes, également issues du Nord Global, contribuent à donner un visage "vert" à ce qui est, en réalité, une destruction accrue des territoires, des forêts et des moyens de subsistance, afin que leurs propres profits et ceux des entreprises qui les financent puissent en grande partie s´accroitre. Pendant ce temps, le gouvernement, les entreprises et les ONG du Pará se disputent l'argent qu'ils peuvent gagner en participant à ces nouveaux marchés et business « verts ». Tout cela montre que dans l'économie verte, de nombreux intérêts sont imbriqués, en particulier ceux des entreprises, des États et de l’« industrie de la préservation», représentée par de grandes ONG. Alors que tout le monde prétend s'attaquer à la déforestation et à ses causes, en réalité, tous, d'une manière ou d'une autre, profitent de la destruction des forêts et de l'expulsion des communautés de leurs territoires.
Sans compter que de nouvelles menaces accompagnent ce processus et pèsent sur les communautés et leur lutte pour maintenir le contrôle de leurs territoires. Par exemple, les nouveaux marchés numériques basés sur la technologie blockchain, tels que les crypto-monnaies et les jetons non fongibles liés aux transactions « vertes » ; ainsi que les technologies de surveillance des forêts et des communautés par le biais de drones. (38)
Une autre nouveauté présente, par exemple, dans le programme LEAF est que, dans ses programmes REDD juridictionnels, il offre la possibilité aux communautés de recevoir des paiements pour la protection de forêts qui n'ont jamais connu de niveaux élevés de déforestation. Cela revient à reconnaître, même indirectement, le rôle de ces communautés dans la conservation des forêts. Cependant, la mesure ressemble beaucoup plus à une forme de cooptation - une vieille tactique des entreprises et des États - pour faire taire les nombreux détracteurs qui se sont opposés au REDD au cours des 18 dernières années. En jetant quelques miettes de ce qu'il possède le plus - l'argent - le grand capital profite une fois de plus des besoins réels de nombreuses communautés marginalisées et opprimées depuis l'époque coloniale.
Secrétariat International de WRM
(1) WRM International Secretariat, https://www.wrm.org.uy/publications/15-years-of-redd
(2) OECO, Amazônia perdeu cerca de 44 milhões de hectares para agropecuária em 35 anos.
(3 Carbon pulse, 2021. REDD developer Biofilica targets tenfold carbon credit growth following merger.
(4) The Ambipar Group has a presence in dozens of countries and owns other companies. Ambito, for example, operates in Latin America and collaborates with companies that directly and/or indirectly increase deforestation—such as Suzano, Unilever and Klabin.
(5) WRM, 2018. Are FSC and RSPO accomplices in crime? Jari Florestal and Agropalma's unresolved land question in the Brazilian Amazon.
(6) Ibid
(7) Verra Registry.
(8) Statement made during a visit to the region; for security, the names of the community and the person who reported the episode will remain confidential.
(9) In 2017, denouncements led the FSC to suspend Jari, until Jari was finally expelled in 2019—something that rarely happens to a certified company. The FSC alleged that Jari was involved in the illegal logging and trade of timber, and that it had failed to recognize the existence of traditional communities in the area. However, the press release did not mention Jari Florestal's falsification of land titles or FSC's collaboration in trying to regularize ill-gotten lands.
(10) Verra Registry.
(11) See O Fato, Bancos deram R$ 165 milhões para desmatadores da Amazônia.
(12) Brasil de Fato, Syngenta, Bayer e JBS se reuniram 216 vezes com alto escalão do governo Bolsonaro.
(13) Reporter Brasil, JBS mantém compra de gado de desmatadores da Amazônia mesmo após multa de R$ 25 milhões.
(14) For example, Seara, owned by JBS, advertises the pollution credits that it bought from the Jari REDD project in the Jari Valley, where "the Jari Group's properties are located" [our emphasis], as if they were legitimate properties. Seara also claims that the group "promotes the well-being of communities, who become allies in the conservation of forest resources." This statement is a complete inversion of reality, as it presents Jari as the protector of forests and communities as a threat.
(15) Economia UOL, INVESTIGAÇÃO-Na Amazônia brasileira, projeto de crédito de carbono em xeque alimenta receio de grilagem de terras.
(16) Forbes, Agropalma retomará produção de biodiesel no Pará em 2023.
(17) Verra Registry.
(18) Ibid 5
(19) Mongabay, Certificação de exportadora de óleo de palma suspensa após investigação da Mongabay; Agropalma also lost its certification in early 2023, in this case, the RSPO certification ("Roundtable on Sustainable Palm Oil"), following an investigation that revealed that over half of the lands it occupies have false and illegal titles.
(20) US$ 6.7 million, based on a price of US$ 10 for each of the 671,744 pollution credits that the project is supposed to generate. See here.
(21) The Guardian, Grain trader Cargill faces legal challenge in US over Brazilian soya supply chain.
(22) SOS Amazonia, Taxa de desmatamento no Acre em 2021 é a maior da última década.
(23) OECO, Em meio a mudanças políticas e avanço do desmatamento, Semana Chico Mendes acontece no Acre, and WRM, 10 Years of REDD+ in Acre and Its Impacts on Indigenous Women and Female "Extrativistas".
(24) Deforestation in the Amazon and the REDD+ Money that Keeps Coming to Brazil.
(25) Plano Estadual Amazônia Agora (PEAA), Secretaria de Estado de Meio Ambiente e Sustentabilidade, and TNC, Recomendações para a consolidação do Plano Estadual Amazônia Agora.
(26) Forest Trends, with the support of the funder, CLUA, is determined to integrate Brazil's indigenous communities into the carbon market, while the Environmental Defense Fund believes that there are "many new opportunities" in Brazil, such as the jurisdictional REDD project itself.
(27) Washington Post, The Nature Conservancy.
(28) Charity Navigator, The Nature Conservancy.
(29) Report Reveals JPMorgan Chase To Top The list of Global Banks With $1.9 Trillion Post-Paris Agreement Investment in Fossil Fuels
(30) Governo do Estado do Pará, Plano Estadual de Bioeconomia do Pará.
(31) TNC, Implementação do mecanismo financeiro de REDD+ do estado do Pará.
(32) Leaf Coalition.
(33) CBS News, BlackRock touts investment in fossil fuels after threat from Texas official.
(34) International Rivers, Carta De Preocupação Com A Chamada "Política Verde” Do Estado Do Pará.
(35) OECO, Atividades de exploração de petróleo e gás na Bacia Sedimentar da Foz do Amazonas.
(36) NeoFeed, Governador do Pará sugere “exploração sustentável” de petróleo na foz do Amazonas.
(37) Folha de São Paulo, Brasil cresce com soja, minas e ouro preto, mas consumo e investimento fraquejam.
(38) WRM, Blockchain and Smart Contracts: Capital's Latest Attempts to Seize Life on Earth.