Nous vous invitons à réfléchir avec une militante du Brésil qui explore les processus de lutte et de résistance et les défis qu’affronte sa communauté. Nous vous invitons également à vous joindre à la résistance collective, peu importe votre propre contexte et vos espaces organisationnels. La lutte continue et la lutte est une !
En vertu de son rôle d’accompagnateur et d’appuyeur des luttes populaires et de la base dans la défense du territoire et des forêts, le WRM a écouté et appris des nombreuses rencontres, échanges, dialogues et visites avec nos alliés de différentes régions du Sud et du Nord mondial. Les innombrables et diverses résistances qui émergent et persistent malgré les obstacles inouïs suscitent notre profonde admiration.
Malgré la violence exercée contre leurs territoires et leurs vies, malgré l’immense pression et les multiples plans d’expansion du modèle extractif présentés comme des « solutions vertes ; » malgré le harcèlement et la violence sexuelle que subissent de nombreuses femmes et filles qui vivent à l’intérieur et à proximité des concessions extractivistes, notamment des plantations industrielles de monocultures, de la contamination de leurs sols, de leurs aliments et de leurs sources d’eau ; malgré l’intimidation et la criminalisation ; malgré la marginalisation et le racisme structurel ; etc. Malgré tout cela, les luttes continuent et l’espoir est présent.
Nous vous invitons à lire une réflexion très importante de Rosalva Gomes, une femme militante du Movimiento Interestadual de Quebradoras de Coco Babasú (Mouvement interétatique de briseuses de coco babasú,) qui vit de la cueillette et de la transformation de cocos du palmier babasú. Elle a relaté son expérience et ses apprentissages sur la résistance et ses défis à l’occasion d’une rencontre de dirigeants et de représentants de communautés du Mozambique, de la Tanzanie et du Brésil touchées par les plantations industrielles d’arbres.
« Il n’y a pas de recette prédéfinie pour résister. Cela dépend de chaque territoire, de sa portée, de sa force interne et aussi de la spécificité de chaque pays, État et communauté. Mais il faut suivre une stratégie d’unification. Parce que nous sommes certaines d’une chose : si nous ne contribuons pas au renforcement, en unissant nos forces, nous subirons des conséquences très importantes, encore plus néfastes. Nous vivons déjà beaucoup de difficultés. L’union des forces entre les communautés et les organisations constitue une des voies d’avenir. »
Depuis 2014, l’usine de Suzano Papel y Celulosa, à Imperatriz, État de Maranhão, Brésil, produit annuellement environ 1,65 million de tonnes de cellulose et 60 000 tonnes de papier hygiénique. Avec les routes, le transport incessant de bois et l’affluence massive de travailleurs, cette usine cause énormément de destruction pour les populations de la zone. Elle raconte :
« C’est dans la communauté de Curvelandia, ici près d’Imperatriz, une communauté de travailleuses et travailleurs ruraux, qu’a commencé le conflit contre les camions qui transportent les troncs d’eucalyptus. Auparavant, les camionneurs utilisaient une route derrière la communauté, mais récemment, ils voulaient emprunter le chemin qui traverse la communauté. Le premier jour, la communauté s’est organisée et unie et a fermé la voie. La police est arrivée sur les lieux avec son air de supériorité pour protéger l’entreprise. Mais la communauté a bloqué le chemin. L’entreprise s’est présentée et des négociations ont commencé. La communauté a exigé la tenue d’une réunion parce qu’on ne l’écoutait pas. Après beaucoup d’insistance, une réunion a eu lieu avec l’entreprise Suzano dans laquelle la communauté a demandé que les camions cessent de traverser la communauté. Entre-temps, les organisations d’appui concevaient des formes de communication et de lancement d’alertes sur ce problème, car ces entreprises n’aiment pas que l’on dénonce leurs crimes. Nous avons produit une vidéo qui raconte l’histoire, nous avons préparé une dénonciation et maintenant nous la remettons au Conseil national des droits humains. Les camions se sont faits plus rares. L’entreprise a tenté de nous intimider, mais elle a vu que nous avons lancé le message “Nous sommes en alerte.”
Comment avons-nous réussi ? Tous les membres de la communauté ont participé. Il y avait des hommes, des femmes, des aînés, des jeunes, tout le monde. Ils ont signé une pétition et présenté un protocole à la municipalité. Ils n’ont consulté personne. C’est un processus lent. Le mouvement doit commencer à l’intérieur et s’étendre vers l’extérieur. Aucune force n’est plus grande que celle-là. Les organisations d’appui aident beaucoup, mais cette force de l’intérieur, cet engagement, cette présence constante, ce savoir alerter, transmettre le message et organiser la population pour qu’elle participe… Notre voie dispose d’une force beaucoup plus grande et elle renforce les groupes qui nous aident.
Ainsi, nous parlons de résistance et de résistance, mais nous devons trouver comment affronter l’entreprise, parce que bien souvent, nous endurons les problèmes, n’est-ce pas ? Il faut lutter pour résoudre nos situations, en tenant compte de nos propres contextes, en nous imposant d’une manière ou d’une autre.
La semence de la lutte et de l’articulation collective constituent deux stratégies qu’il faut adapter aux conditions de chaque région et pays, afin qu’elles fonctionnent vraiment. »
Joignons-nous toutes et tous à la résistance collective à partir de nos propres contextes et espaces de lutte !