Afrique du Sud : une recherche apporte des preuves concluantes des effets des plantations d’arbres sur l’eau

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En ce moment où les ressources hydriques deviennent rares et sont de plus en plus menacées par le réchauffement planétaire et par le changement climatique, une recherche menée en Afrique du Sud s’avère très opportune. Après avoir surveillé pendant 70 ans la réserve de Jonkershoek, située au Cap, dans le Sud-Est du pays, l’étude révèle l’impact des plantations d’arbres en régime de monoculture sur l’eau souterraine et sur le débit des fleuves. Cela est très important, car les plantations d’arbres consomment un volume d’eau considérable et se sont multipliées en Afrique du Sud, un pays aride.

Le rapport “The Jonkershoek Research Catchments: History and Impacts on Commercial Forestry in South Africa”, d’Arthur Chapman, fut présenté en septembre 2007 à l’occasion d’une journée de champ du symposium international sur la certification des plantations d’arbres, (“Impact of Certification on Plantation Forestry”) en Afrique du Sud.

Par la suite, et grâce à la collaboration de GeaSphere / EcoDoc Africa (avec des fonds de la Société suédoise pour la conservation de la nature), le documentaire éducatif “Plantation Trees and Water Use: Seventy years of Jonkershoek Paired Catchment Experiments” (Plantation d’arbres et consommation d’eau : soixante-dix années d’expériences dans le bassin de Jonkershoek, 1e partieet 2e"> partie) montrait Arthur Chapman en train de raconter l’histoire des soixante-dix années de recherches hydrologiques menées dans la vallée de Jonkershoek et d’expliquer comment fonctionnent les expériences de comparaison par paires et combien d’eau consomment vraiment les arbres.

L’histoire commence en Afrique du Sud dans les années 1850, à l’époque où les forêts de la région furent décimées par les colons européens. Pour y porter remède, un programme de boisement fut appliqué, en utilisant des espèces exotiques, surtout des eucalyptus venus d’Australie et des pins méditerranéens et nord-américains. Dès 1900 les agriculteurs commencèrent à s’inquiéter parce qu’ils remarquèrent que le débit des fleuves diminuait en aval des plantations.

Cette inquiétude fut portée finalement en 1935 à la Quatrième Conférence sylvicole de l’Empire britannique. Le ministre de l’Agriculture et de la Sylviculture de l’époque parla du « problème de l’influence du boisement sur les réserves d’eau, qui a donné lieu à une controverse, surtout en ce qui concerne l’emploi d’arbres exotiques, les eucalyptus surtout et, dans une moindre mesure, les pins ».

La conférence reconnut le problème et approuva un programme de recherche hydrologique. En 1936, les travaux de construction de petits barrages avaient démarré dans la forêt domaniale de Jonkershoek. Depuis cette date, les plantations d’arbres ont été surveillées dans neuf bassins.

L’expérience était basée dans la méthode de comparaison par paires, qui consiste à comparer le débit de deux bassins non traités pour établir les rapports qui existent naturellement entre eux. Ensuite, l’un d’eux est traité, par exemple en y plantant des arbres. Le changement du rapport entre les deux bassins après le boisement peut ensuite être attribué au traitement ou à l’influence du boisement. Vingt-neuf pluviomètres, dont 12 fonctionnaient en continu, mesuraient la quantité d’eau qui parvenait aux bassins et 8 barrages (dont 6 sont encore en fonctionnement) mesuraient ce qui en sortait.

Les bassins ont une superficie de 27 à 246 ha ; ils ont des pentes relativement raides et un fort gradient pluviométrique dû au forçage orographique des systèmes frontaux du nord-ouest pendant les mois d’hiver (la partie orientale du Cap a un climat méditerranéen). Les précipitations moyennes, qui sont d’environ 1 200 mm sur les pentes les plus basses, peuvent augmenter jusqu’à 3 000 mm.

Les résultats obtenus concernant l’impact des plantations d’arbres sur l’eau sont solides et assez concluants, et comportent même certaines conclusions pratiques.

Là où poussent des pins, la consommation d’eau équivaut à 300 – 400 mm d’eau de pluie. Autrement dit, la plantation consomme 400 millions de litres d’eau par kilomètre carré par an ; il y a donc 400 millions de litre qui ne parviennent pas aux fleuves.

Les eucalyptus se sont avérés beaucoup plus voraces : 600 millions de litres d’eau par kilomètre carré et par an ne parviennent pas aux fleuves. Dans un cas ou deux, un sol au profil très profond, plein d’humidité, a consommé l’eau de pluie en plus de l’humidité du sol existante qui, en principe, aurait dû parvenir au fleuve. Celui-ci disparut complètement ; après la coupe claire, il fallut quatre ans pour que le profil du sol se rétablisse et que le fleuve réapparaisse.

La diminution du débit est évidente au bout d’environ cinq ans, et elle est fortement liée à l’âge de la plantation. La diminution maximale se produit quand les arbres ont une quinzaine d’années et elle est suivie d’une légère diminution de la consommation d’eau. En général, la diminution du débit est de 30 – 40 mm par 10 % du bassin planté, au moment de la consommation la plus forte.

Quand on lui demanda quelle est la consommation journalière d’un arbre, Chapman répondit qu’on peut estimer raisonnablement qu’un arbre de 5 à 7 ans consomme 50 litres d’eau par jour. Néanmoins, dans le cas de l’eucalyptus, la moyenne peut se situer entre 100 et 1 000 litres par jour, suivant l’endroit : les arbres proches d’une rivière peuvent consommer deux fois plus parce qu’ils ont l’eau à leur portée.

Les conclusions de l’étude et du documentaire confirment qu’il est urgent de débattre sur le danger que représentent les plantations industrielles d’arbres, pour l’eau en particulier, dans tous les pays où elles sont établies.