Le changement climatique comme processus de modification du complexe système de phénomènes qui se produisent dans l’atmosphère (température, humidité, pression, vents et précipitations), n’est pas quelque chose de nouveau pour notre planète. Il est survenu durant des périodes de temps très longues, comme conséquence d’éruptions volcaniques, de changements dans l’émission des radiations solaires, dans la composition de l’atmosphère, dans la disposition des continents, dans les courants marins ou dans l’orbite de la Terre.
Lors d’épisodes de changement soudain, comme celui enregistré il y a quelque 55 millions d’années, peut-être produit d’une intense activité volcanique coïncidente avec un sommet de la tendance graduelle au réchauffement planétaire, les températures connurent une augmentation de l’ordre de 6ºC. Des millions de tonnes de carbone furent libérées dans l’océan et dans l’atmosphère, provoquant l’extinction de nombreuses espèces dans le fond des mers. D’autres évènements subits similaires eurent lieu il y a environ 120 et 183 millions d’années. Dans tous ces cas, quelque 100 000 ans durent s’écouler pour que le climat se remît de ses blessures.
Pendant la dernière période glaciaire (qui commença il y a 110.000 et finit il y a 11.500 ans), la température se réchauffa et se refroidit alternativement plusieurs fois de plus de 10ºC, provoquant d’importants changements climatiques dans tout l’hémisphère nord. Chaque épisode de réchauffement et de refroidissement se produisit en quelques décades et dura des centaines d’années (1).
La variante qui fut introduite pendant les 200 dernières années, après la Révolution Industrielle, est que la concentration des gaz qui produisent l’effet de serre – et qui dans la proportion juste ont rendu possible la vie sur la terre, en retenant la chaleur qui émane de la surface terrestre – a augmenté en flèche comme conséquence de la combustion démesurée de combustibles fossiles (pétrole, gaz, charbon) due aux activités humaines. Ceci provoqua une augmentation de la température atmosphérique avec l’accélération du changement climatique qui en découla. Le résultat a été une altération du climat, qui suit une courbe non linéaire avec des évènements inattendus et drastiques quand les niveaux de gaz à effet de serre atteignent un point critique qui déclenche d’autres processus jusqu’alors inconnus. Cela place la planète dans une situation d’urgence dans laquelle la vie sur la Terre telle que nous la connaissons est en péril.
Le Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), un groupe de scientifiques experts en la matière créé à la demande de l’Organisation météorologique mondiale et du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), a estimé que, pour éviter une augmentation critique de la température de la planète, il est nécessaire de réduire les émissions issues de la combustion de pétrole et autres combustibles fossiles de 80 % à 95 % d’ici à 2050.
Or, les niveaux d’émissions non seulement se sont maintenus mais ils ont même augmenté ! La calotte glaciaire arctique a atteint son niveau le plus bas enregistré jusqu’à présent, tandis que la fonte de la couche souterraine de glace (pergélisol) de Sibérie est en train de libérer de vastes dépôts de méthane (un gaz à effet de serre), aggravant ainsi le réchauffement planétaire. D’autre part, 40 % des émissions de dioxyde de carbone (CO2) fruit des activités humaines et qui ont augmenté brutalement pendant les deux derniers siècles, ont été absorbés par les océans provoquant leur acidification, ce qui peut s’aggraver encore plus, avec des conséquences désastreuses pour la vie des organismes marins.
Les dernières estimations annoncent que la température moyenne continuera à augmenter, mais que le degré et la durée de cette hausse, ainsi que la gravité de ses conséquences, dépendront de la rapidité et de l’efficacité apportées à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Pendant ce temps, selon les données de l’Union pour la conservation de la nature (UICN), le cinquième des vertébrés de la planète est en danger d’extinction, pour diverses raisons parmi lesquelles figure l’augmentation de la température mondiale.
En arrière-fond de la catastrophe climatique
En avril de cette année, plus de 35.000 personnes se sont réunies à Cochabamba, Bolivie. La Conférence mondiale des peuples sur le changement climatique et les droits de la Mère-Terre a reçu de nouvelles visions et propositions pour sauver la planète, et surtout a mis sur le tapis les causes de la crise climatique. Dans la déclaration finale de la rencontre (2) on réaffirme que nous nous trouvons face à « la crise finale d’un modèle de civilisation patriarcal basé sur l’assujettissement et la destruction d’êtres humains et de la nature, destruction qui s’est accélérée avec la révolution industrielle ».
La responsabilité du chemin suivi incombe aux pays dits « développés », qui doivent modifier « leurs modèles de vie et de développement, en annulant la dette extérieure immédiatement, en arrêtant la production de matériel de guerre, en utilisant une énergie renouvelable au lieu de l’énergie fossile et en changeant les systèmes financiers, économiques et sociaux internationaux, qui perpétuent les modèles actuels ». (3)
Ce système de marchés mondiaux a été imposé à feu et à sang. Et l’on mentionne rarement la contribution des guerres au changement climatique : depuis les déboisements massifs, comme celui qu’a connu le Vietnam du fait de la longue guerre d’occupation des troupes des USA, jusqu’à la consommation de combustible que réclame la mobilisation de tout l’attirail militaire.
D’après des estimations faites en 2006 par la CIA elle-même, seuls 35 pays (sur le total de 210 qu’il y a dans le monde) consomment plus de pétrole par jour que le Pentagone. Selon Steve Kretzmann, directeur d’Oil Exchange International, la guerre d’invasion en Irak émet plus de 60 % du total mondial des émissions (4). Mais il n’y a pas de restrictions en matière d’émissions pour les forces armées, et l’accord de Copenhague passe l’affaire sous silence.
Dérivations : dette climatique, migration, fraudes
La dette climatique
La révolution industrielle a été la plate-forme de décollage du système actuel de production intensive et à grande échelle, du commerce mondial et de la consommation exacerbée. Comme corollaire, elle a aussi entraîné un « saut quantique » des émissions de gaz à effet de serre. Dans les deux cas, les processus ont, si l’on peut dire, un nom et un prénom. L’exploitation et la consommation de combustibles fossiles, de forêts, de terres agricoles et autres ressources de la planète – généralement situés dans les pays du Sud, et que l’on s’est fort souvent appropriés par le pouvoir et par la force – ont permis aux pays industrialisés d’atteindre la puissance économique qui est aujourd’hui la leur.
La dette écologique historique des pays du Nord, générée par l’occupation de territoires et l’appropriation à bon compte et la destruction des biens naturels du Sud, s’est transférée au climat avec la contamination par les émissions de dioxyde de carbone et l’occupation de l’espace atmosphérique : de là est née la dette climatique.
Le Professeur Stephen Pacala, de l’Université de Princeton, cité dans un article de Barry Saxifrage (5), a calculé les émissions par personne de 6 500 millions de personnes. Il est arrivé à la conclusion que 3 000 millions de pauvres n’émettent pratiquement rien (6). Par pays aussi la différence est accablante. Voici quelques exemples d’émissions annuelles de tonnes de carbone par personne : Zimbabwe 0,93 ; USA 19,66 ; Canada 17,86 ; Inde 1,17 ; Chine 3,7. C’est-à-dire qu’une personne émet en moyenne 20 fois plus de carbone aux USA ou au Canada que dans un pays du Sud comme le Zimbabwe.
Au niveau mondial, les pays qui sont dans les 8% les plus riches émettent 50 % du total des émissions, et ceux qui sont dans les 15 % les plus riches en émettent 75%. Le reste, soit 85% de l’humanité, émet seulement 25 % du total.
Ce tableau conduit à des considérations intéressantes quant aux mesures à prendre pour affronter le changement climatique : ce sont les 15 % les plus riches qui doivent réduire de manière significative leurs émissions, et la majeure partie de la réduction doit provenir des 8 % les plus riches. Et ceci tout simplement parce que ce sont eux qui utilisent presque tous les combustibles fossiles.
Or, la tendance ne suit pas ce chemin. Même si Todd Stern en personne, un des principaux négociateurs des USA sur le climat à Copenhague, a reconnu le rôle historique de son pays dans le niveau actuel de concentration des émissions, il s’est empressé de signaler que les USA repoussent catégoriquement tout sentiment de culpabilité ou toute idée de réparation (7). Juste au moment où ils devraient assumer leur responsabilité et agir pour faire face à la crise sociale, écologique et planétaire. Cette réticence a été démontrée en 2009, au Sommet raté de Copenhague, matérialisée dans le pitoyable « accord » que les pays industrialisés eux-mêmes ont bricolé pour s’auto-obliger, non pas à des émissions zéro, mais à un engagement zéro à les réduire.
Jusqu’à maintenant, dans le long déroulement de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, il n’a pas surgi autre chose que des distractions – dans le meilleur des cas – et des solutions fausses qui écartent complètement du seul chemin viable : changer les modèles productifs, commerciaux et de consommation, actuellement soumis aux intérêts des entreprises, qui exigent une consommation excessive de combustibles fossiles et qui produisent des situations d’inégalité et d’injustice. Changer le système, pas le climat.
La migration
Le changement climatique aggrave aussi la pire crise migratoire que l’humanité ait dû affronter, et qui se manifeste aujourd’hui par 214 millions d’êtres humains déplacés (8). Les sècheresses, les inondations provoquées par des tempêtes ou des ouragans, la pollution de l’eau, l’érosion et la dégradation du sol et autres effets destructeurs de la catastrophe écologique actuelle s’ajoutent aux facteurs qui sont en train d’obliger les gens à émigrer, soit par manque d’accès aux terres agricoles, soit à cause de la rareté de l’eau. On estime que 50 millions de personnes ont dû émigrer sous les effets du changement climatique.
Les milliers de personnes qui doivent abandonner les zones rurales intègrent très souvent les ceintures de pauvreté des villes. Celles qui émigrent vers des pays du Nord, cherchant désespérément à survivre, se heurtent souvent à de durs contrôles aux frontières d’un monde ouvert au capital, mais pas à ceux qu’il finit par expulser. Beaucoup de ceux qui parviennent à éviter ces contrôles finissent comme citoyens de seconde catégorie qui vivent dans une situation de déracinement dans des pays où la surconsommation et l’opulence des citoyens de première deviennent insultantes et exacerbent les problèmes sociaux.
La crise migratoire, la crise climatique et la crise sociale sont les divers visages d’un même problème.
Les fraudes
C’est incroyable : la crise climatique, qui tient en échec l’humanité, s’est transformée pour les insatiables intérêts des entreprises en une chance de faire des affaires. Le marché mondial du carbone remue beaucoup de capitaux et devient le théâtre possible de délits environnementaux.
Un article de Mark Shapiro (9) informe sur une conférence organisée par Interpol, dont la juridiction serait élargie à un terrain complètement nouveau : la fraude sur les marchés du carbone. Ces marchés complexes, qui opèrent dans des pays soumis à la restriction de leurs émissions en application du Protocole de Kyoto, et qui manient de nombreux instruments nouveaux, ont connu une croissance exponentielle au cours des cinq dernières années. Leurs transactions ont atteint la valeur de 300 000 millions de dollars, une somme très élevée qui attire fatalement les délinquants. Soumis à une supervision ambiguë, ces marchés offrent de nouvelles possibilités à la fraude. Le carbone devient une marchandise qui se commercialise.
L’intérêt qui existe à ce que la conservation des forêts devienne une « compensation » des émissions de carbone dues à des entreprises ou à des gouvernements situés ailleurs, ouvre la porte à de possibles fraudes dans des pays où la propriété de la terre est encore en discussion.
Il ne s’agit pas là d’élucubrations. Le département anti-corruption de la police londonienne enquête sur des accusations selon lesquelles l’entreprise Carbon Harvesting Company, qui opère dans le secteur des compensations d’émissions, aurait indûment réclamé un accès à des forêts du Liberia pour vendre des droits d’émission à des entreprises européennes, entre autres. Dans d’autres cas, les agents spéculateurs ont généré des bénéfices illicites millionnaires par évasion fiscale. Ce fut par exemple le cas qui dévoila que plus de 80% des entreprises de commerce de carbone du Danemark n’étaient qu’une façade pour frauder le fisc. Le ministre de l’environnement du Royaume-Uni lui-même, Lord Chris Smith, a reconnu que, à mesure que le prix du carbone augmente, le marché devient plus lucratif et attire davantage de délinquants.
La crise comme opportunité… de bonnes affaires ?
Le dénommé « Capitalisme 2.0 », modèle ressuscité du capitalisme libéral, pour contourner les sables mouvants de la finance dans son nouveau cycle d’accumulation trouve très opportun de tirer profit de la crise climatique. Le président de la Shell au Royaume-Uni en personne a déclaré que, pour les affaires, faire face au changement climatique est aussi bien une nécessité qu’une grande opportunité.
Le protocole de Kyoto fournit la forme et le contenu, grâce à quoi furent inventées des stratégies comme le système Cap and Trade (fixation de limites maxima d’émission et échange des droits d’émission) et les Mécanismes de développement propre. La Banque mondiale, entre autres, se précipita aussitôt, en avançant l’idée de transformer la tragédie (émissions de carbone) en marchandise, et en créant un marché pour y spéculer sur cette nouvelle denrée, partant de la prémisse que l’argent pourrait réparer les dégâts.
Mais, ce qu’a fait le marché du carbone, et le commerce des émissions de carbone (CO2) qui en est né, contrôlé par le même système économique qui est à la racine de la crise climatique, c’est contribuer à maintenir l’hégémonie du capital. Donc, par cette voie, la perspective n’est pas du tout encourageante.
Des « solutions » qui font partie du problème
• MDP : ni développement ni propre
Nous vivons des temps où il est indispensable de savoir que les programmes de ralentissement du changement climatique et d’adaptation à ce même phénomène, en suivant les directives de la Convention sur les changements climatiques et de son Protocole de Kyoto – qui s’appuient sur des critères de marché - ne sont pas parvenus à inverser le changement climatique. La preuve évidente en est que les émissions de CO2 ont continué à augmenter, ainsi que la température mondiale moyenne (10). En revanche, ils ont connu le succès en offrant de bonnes affaires d’investissement dans les pays du Sud, et en créant une spéculation financière qui, dans certains cas, a provoqué des situations de corruption.
En Afrique, énorme continent convoité pour ses territoires immenses et pour sa profusion en ressources naturelles, Blessing Karumbidza et Wally Menne dénoncent le cas du village Idete dans le district de Mufindi, province d’Iringa, dans la région méridionale de la Tanzanie (11). Là-bas, dans le cadre d’un projet de supposé « développement propre » (avec un faible niveau d’émissions de carbone), l’entreprise norvégienne Green Resources Ltd. a un projet de plantation d’eucalyptus et de pins exotiques en régime de monoculture dans les prairies humides du Sud de Mufindi.
L’argument est que les plantations d’arbres sont positives pour le changement climatique, dans la mesure où elles agissent comme des « puits de carbone », générant ainsi une « épargne » d’émissions de carbone. Cette dernière prend la forme de « certificats de réduction d’émissions » (CER) ou « crédits de carbone » qui peuvent être achetés dans le marché du carbone par des industries ou des gouvernements du Nord pour compenser une partie de leurs obligations de réduction d’émissions. C’est ainsi que fonctionne le dénommé « Mécanisme de développement propre » (MDP) qui prend appui sur une supercherie : prétendre qu’il est valide de compenser le carbone additionnel extrait du sous-sol (combustibles fossiles) avec le carbone atmosphérique qui se recycle, en maintenant ainsi un bilan stable.
Green Resources Ltd. espère que les plantations d’arbres qui ont été établies sur de riches prairies seront acceptées comme MDP et génèreront des CER qu’elle pourra vendre au gouvernement de Norvège. Considérer les effets négatifs des plantations forestières sur le sol de la prairie, sur les réserves d’eau et sur les communautés locales reste hors sujet. On ne prend pas davantage en compte le fait que la prairie accumule une réserve de carbone qui peut rester sur place pendant des centaines ou des milliers d’années, et qui peut même, sous certaines conditions, continuer à augmenter.
La filiale de Green Resources en Tanzanie a acquis pour pas cher 14 000 hectares de terres à la communauté d’Idete, où elle en a déjà planté 2 600. Elle a le plan de continuer à acheter davantage de terre : pas moins de 170 000 hectares rien qu’en Tanzanie, où on lui garantit la possession pendant 99 ans, dans un pays à l’économie principalement rurale, où la possession de la terre, son accès et son contrôle sont essentiels pour la survie. Ses clients captifs sont des communautés très souvent en situation de pauvreté, et complètement étrangères à la sophistication de ce type d’affaires internationales, et un gouvernement disposé à échanger des biens naturels contre des investissements étrangers. Il n’est pas difficile d’imaginer la situation et ses résultats. Pour le gouvernement de Norvège, important producteur et exportateur de pétrole, le projet de l’entreprise nationale lui sert à acheter des crédits de carbone et, grâce à eux, à pouvoir affirmer qu’il a « compensé » ses émissions intérieures. Pour les communautés, il reste peu de chose, et il restera encore moins quand les plantations commenceront à épuiser leurs réserves d’eau. C’est ainsi que se prépare le « colonialisme du carbone ».
Il est inacceptable que les fonds qui étaient supposés être destinés à résoudre les problèmes de climat servent à appuyer des projets de plantations forestières à grande échelle qui, outre qu’elles ne contribuent pas à résoudre la crise climatique, augmentent la vulnérabilité des communautés à la pauvreté, et en minent la souveraineté alimentaire.
• Biochar : monoculture forestière en sous-sol ?
Une autre des solutions qui ont été inventées comme stratégie de « ralentissement du changement climatique » - tout sauf penser à démanteler le modèle pétrolier – est ce que l’on connaît sous le nom de biochar. Il s’agit de brûler par pyrolyse – méthode de décomposition de matière organique chauffée en l’absence d’oxygène – des « déchets » ou des cultures agricoles et du bois d’arbres plantés dans ce but. Le charbon obtenu, mélangé à des fertilisants (produits à partir de combustibles fossiles) serait ajouté au sol où il resterait « séquestré ». L’argument est qu’il régénèrerait au passage les terres dégradées. D’un autre côté, ses promoteurs assurent que le système produit de l’énergie qui serait utilisée pour substituer dans quelques cas les combustibles fossiles.
Dans ce domaine aussi on parle de grandes possibilités d’investissement pour obtenir une production de charbon à grande échelle. Des projets de biochar sont déjà en marche dans plusieurs pays d’Afrique : Burkina Fasso, Cameroun, Côte d’Ivoire, République démocratique du Congo, Égypte, Gambie, Ghana, Kenya, Mali, Namibie, Niger, Sénégal, Afrique du Sud, Tanzanie, Ouganda et Zambie (12).
On estime qu’il faudrait au moins 500 millions d’hectares de terre pour produire du charbon, probablement à partir surtout d’énormes plantations d’arbres, en plus de l’énergie correspondante. (13) Cela représente une terrible menace pour le mode de vie de nombreuses communautés, certaines indigènes, qui se verraient déplacées de leurs terres et perdraient leurs moyens d’existence. Il y a même le risque que ces dangers soient renforcés par le développement de variétés d’arbres génétiquement modifiés (GM) pour la production de biochar, ou bien par l’augmentation du nombre d’espèces d’arbres à croissance rapide.
Jusqu’à présent, il n’y a pas d’études sur les effets à long terme du biochar sur la stabilité des sols, ni sur ce que supposerait pour la biodiversité le fait de prendre même les plus petites tiges pour les brûler et les enterrer, en subtilisant au sol des nutriments et la matière organique avec laquelle il produirait l’humus. Cela altèrerait aussi les écosystèmes naturels qui jouent un rôle essentiel dans la stabilité et la régulation du climat, et sont la base de la production d’aliments et de la protection de l’eau. On ne sait pas encore si le charbon intégré au sol représente d’une façon ou d’une autre un « puits de carbone ».
Le PNUE lance une alerte sur la méconnaissance des effets à long terme du procédé, sur la durabilité agricole et la biodiversité, et conseille de traiter cette proposition avec une grande prudence (14). Cela n’empêche pas le lobby dans ce domaine, représenté par International Biochar Initiative, composé en majorité d’entreprises et d’universitaires très souvent proches d’intérêts commerciaux, de préconiser le développement du biochar et de tenter de l’inclure dans les marchés internationaux du carbone.
Tout tourne autour du contenu en carbone, avec le regard fixé sur le marché ad hoc.
• Biomasse : stratégie de vente
Si ce n’était pas tragique, ce serait à mourir de rire. Avec l’humanité coincée comme elle l’est face à une urgence climatique, nous voyons comment les forces économiques qui ont forgé le système industriel et pétrolier qui nous a mis dans cette situation, proposent maintenant certains changements pour que tout continue comme avant : entre autres choses, le même volume de transport privé, le même trafic de navires et d’avions cargos pour que continue le transfert de marchandises dans les marchés mondialisés, la même frénésie de production industrielle, la même expansion de l’agriculture industrielle. Tout pareil, et dans les mêmes mains, mais avec une touche de « bio ».
C’est ainsi qu’apparaît la proposition de substituer le combustible fossile par un combustible dérivé de la biomasse. Serait-ce possible ?
Jim Thomas, de ETC, donne une liste de produits et de services actuellement issus de combustibles fossiles (15):
- Carburant pour le transport (automobiles, camions, avions) : avec le combustible pour le chauffage, il accapare près de 70% du pétrole.
- Electricité : charbon, gaz naturel et pétrole sont actuellement les facteurs de 67 % de la production mondiale d’électricité.
- Produits chimiques et plastiques : 10 % environ des réserves mondiales de pétrole sont transformés en plastiques et en pétrochimiques.
- Fertilisants : la production à l’échelle mondiale requiert une utilisation intensive du gaz naturel.
Il y a des formules pour passer au « bio » à partir de la biomasse : pour le transport, il est possible d’obtenir de l’éthanol et du biodiesel ; pour l’électricité, on est en train de pratiquer la combustion de charbon et de biomasse mélangés, alors que l’on recherche des façons d’utiliser la nanocellulose et des bactéries synthétiques pour obtenir le courant électrique des cellules vivantes ; on pense utiliser du sucre pour produire des bioplastiques et des produits chimiques ; le biochar est proposé comme substitut des fertilisants à l’échelle industrielle.
Comme le pense à juste titre Thomas, pendant des millénaires le monde végétal a été une source de combustibles et de production de matériaux, mais le nouvel usage du terme « biomasse » marque un changement spécifique dans la relation de l’humanité avec les plantes. On perd l’univers taxonomique des espèces et des variétés que ce terme suggérait, pour traiter la matière organique depuis un point de vue industriel comme une seule chose indifférenciée, une masse, la biomasse.
C’est ainsi que, pour le monde du biocommerce, les écosystèmes, les plantes, la matière organique se réduisent à des dénominateurs communs, à des matières premières : les prairies et les forêts deviennent des sources de cellulose ou de carbone. Et de ce point de vue, les bois et les plantations industrielles d’arbres sont la même chose, de même que pour ceux qui les voient comme des sources de carbone ou de bois.
D’autre part, la terre fertile acquiert maintenant une valeur supplémentaire comme source potentielle de biomasse, ce qui accélère l’appropriation des terres, principalement dans des territoires du Sud, et tout spécialement en Afrique. Les technologies pour la transformation de la biomasse – nanotechnologie, biotechnologie et biologie synthétique – sont les outils qui permettront d’extraire la nouvelle matière première.
Il est en train de s’organiser tout un creuset de fusions et de mouvements d’entreprises dans les secteurs des laboratoires chimiques et biotechnologiques, des entreprises forestières et de l’agrocommerce, pour permettre ce type de « changements » : l’appropriation d’une nouvelle matière première comme combustible (dans le meilleur des cas) et rien d’autre. Grâce à quoi il est garanti que tout restera dans le même circuit de pouvoir et que le système d’accumulation de capital s’éternisera, avec sa contrepartie d’inégalités, de pauvreté et d’exclusion. Le modèle de production, de commercialisation et de consommation qui est à la racine de la crise climatique reste intact.
Dans le cas des agrocombustibles, on se propose d’adopter le biodiesel (obtenu à partir de plantes oléagineuses) et l’éthanol (que l’on obtient par la fermentation de la cellulose contenue dans les végétaux). Comme il n’est pas question de baisser le volume de la demande, il devrait se produire une énorme expansion des plantations qui serviraient à cette fin, comme le soja, le maïs, le palmier à huile, la canne à sucre, le jatropha et l’eucalyptus, entre autres.
En 2006, et comme partie de son engagement à réduire ses émissions de carbone, l’Union européenne se fixa comme but que, en 2010, 10 % du combustible utilisé dans le transport fût d’origine agricole. Comme conséquence, cette annonce qui conduirait à inonder de ces plantations 69 000 km2 (6 900 000 hectares) de terre a déchaîné une tempête. (16) Les systèmes d’agriculture familiale et paysanne, tout autant que les forêts, les prairies, les zones humides et divers écosystèmes seraient emportés par l’expansion des agrocombustibles.
De toute façon, ceci n’impliquera pas un changement radical dans la matrice énergétique mondiale. On continue à faire des explorations à la recherche de combustibles fossiles, on continue à exploiter le charbon, le pétrole et le gaz, et rien ne semble indiquer que cela doive changer.
• REDD
Une nouvelle fausse solution est apparue. Elle est devenue un programme-étoile, dûment maquillé en vert comme pour faire naître une confusion… et encore des affaires. Les projets appelés REDD (Réduction des Emissions dues au Déboisement et à la Dégradation des forêts), s’ils sont encore en couveuse, se profilent déjà comme un mécanisme de marché qui servira à « compenser » les émissions de carbone. Les crédits de carbone qui naîtraient du fait de ne pas toucher à une région boisée pourraient se vendre dans les marchés de carbone internationaux, et les pays pollueurs du Nord pourraient les acheter, pour les comptabiliser comme partie des engagements qu’ils ont pris de réduire leurs émissions. Une autre manière de faire que rien ne change.
Pourtant, le paquet dans lequel est présenté REDD est attrayant : quoi de mieux pour une communauté sylvicole qu’on lui garantisse que sa forêt sera protégée, et qu’en plus on la paiera pour la conserver ? Cependant, il est difficile de croire que les mêmes forces mercantiles qui ont déchaîné la contamination puissent devenir des philanthropes.
Les communautés qui dépendent des forêts verraient leurs modes de vie radicalement changés. Dans le cadre d’un projet REDD, elles perdraient leur droit d’accès à la forêt, dans la mesure où tout usage de cette dernière (pour le chauffage, la construction, la culture, ou comme source de revenus) serait vu comme une «dégradation » car il réduirait le carbone emmagasiné dans la forêt. Ces limitations auraient sans doute des répercussions sur la souveraineté alimentaire, sur la trame sociale et sur l’identité culturelle des peuples indigènes et des communautés paysannes.
D’autre part, il est évident que cette mesure ne peut pas être considérée sérieusement comme une réduction à long terme des émissions de carbone. En premier lieu parce que, comme nous l’avons déjà commenté (http://www.wrm.org.uy/publicaciones/REDD.pdf), elle se base sur la prémisse que le carbone libéré à partir du déboisement est le même que le carbone produit par la combustion de combustibles fossiles. Or cette affirmation initiale est fausse, puisque le changement climatique ne naît pas des émissions des forêts, mais de l’augmentation constante du stock total de carbone atmosphérique due au brûlage de combustibles fossiles. C’est ce carbone, emmagasiné dans le sous-sol pendant des millions d’années sous forme de charbon, de pétrole et de gaz, qui cause le problème. Ledit carbone – qui ne fait pas partie du cycle naturel du carbone émis et absorbé en permanence par les végétaux – a commencé à s’accumuler dans l’atmosphère, et a donné lieu au réchauffement planétaire qui, à son tour, déclenche le changement climatique. Prétendre que les émissions de carbone des combustibles fossiles puissent être « compensées » par le simple expédient d’éviter des émissions provenant du déboisement est un argument faux, dilatoire et létal.
NON À REDD
C’est pour cela que les plaintes des organisations sociales contre les projets REDD se sont peu à peu transformées en expressions de refus. L’Accord des Peuples signé le 22 avril à Cochabamba, en Bolivie, reflète ce refus : plus de 30 000 personnes, dont la plupart représentaient des organisations sociales, exigent aux pays développés de réduire d’au moins 50 % leurs émissions, et de le faire réellement, sans faire appel à des systèmes frauduleux « qui déguisent la non-réduction des gaz à effet de serre », comme les mécanismes de marché ou le mécanisme REDD, à propos duquel l’Accord dit : « Nous condamnons les mécanismes de marché, comme le mécanisme REDD (Réduction des Émissions dues au Déboisement et à la Dégradation des forêts) et ses versions + et ++, car il viole la souveraineté des peuples et leur droit au consentement libre, préalable et informé, ainsi que la souveraineté des États nationaux, et qu’il viole en plus les droits, les us et les coutumes des peuples et les droits de la nature ». (17)
Un cas REDD : Le destructeur de forêts Oji Paper fera une étude de faisabilité sur REDD au Laos
En 2005, l’entreprise japonaise prit à sa charge un projet pour la plantation de 50 000 hectares d’eucalyptus dans la région centrale du Laos. L’année suivante, au cours d’une recherche au Laos, un scientifique canadien prit une série de photographies des forêts défrichées par Oji. À présent, Oji Paper veut obtenir du financement REDD pour ses plantations laotiennes.
Le moment ne pourrait pas être meilleur. À quelques semaines seulement de la conférence de Cancún, Oji Paper est en train de démontrer que les pourparlers internationaux concernant REDD ont un problème grave : ils ne font pas la différence entre les forêts et les plantations. Oji est en train de démontrer aussi que les grandes entreprises peuvent tirer profit de REDD, même si leurs activités ont de graves répercussions sur les moyens d’existence locaux.
Oji Paper entreprit cette année, dans le Sud du Laos, un autre projet de plantation qui comprend 30 000 hectares. L’étude de faisabilité, qui démarre ce mois-ci et se poursuivra jusqu’en mars 2011, examinera les possibilités d’obtenir des fonds REDD pour les plantations de l’entreprise dans au Laos central et méridional. L’étude fut commandée par le ministère japonais de l’économie, du commerce et de l’industrie. D’après un communiqué de presse d’Oji Paper, elle est censée examiner « les méthodes de mesure en place et évaluer l’efficacité des projets de plantation en matière d’absorption de CO2, ainsi que l’efficacité des mesures contre la déforestation et la dégradation des forêts à réduire les émissions de CO2 ». [1]
Oji Paper prévoit d’exporter des copeaux de bois de ses plantations au Laos pour alimenter ses activités papetières toujours en expansion. Il sera intéressant de voir comment l’étude de faisabilité prendra en compte le fait que les plantations d’Oji Paper n’auront pas le temps de stocker du carbone parce qu’elles seront réduites en copeaux, transportées par des camions et des bateaux et transformées en papier. Une fois utilisé, la plupart de ce papier sera jeté dans des dépotoirs où il pourrira et produira du méthane.
Oji Paper est une des plus grandes entreprises papetières du monde. Au total, elle a 240 000 hectares de plantations au Laos, au Vietnam, en Chine, en Indonésie, en Australie, en Nouvelle-Zélande, au Canada et au Brésil. L’entreprise est en train de concevoir un programme REDD et entend appliquer à ses autres plantations les résultats de son étude de faisabilité au Laos.
Entre 2004 et 2006, Keith Barney, chercheur de l’université de York, Toronto, fit une recherche dans le village de Ban Pak Veng, au Laos, dans le district de Hinboun. Barney dit que le village subit des « effets d’un double déplacement » : le premier, dû au fait qu’il est situé en aval du barrage de Theun Hinboun, récemment construit, et le deuxième, à cause des plantations d’Oji. « Le programme de réforme agraire, écrit Barney, a fait que les forêts villageoises dégradées, qui sont cruciales pour la sécurité alimentaire des villages et la production itinérante, soient affectées aux plantations industrielles et rasées au bulldozer ».
La concession d’Oji au Laos central couvre une superficie de 154 000 hectares, dont 50 000 seront plantés. Plus de 55 000 personnes habitent dans les limites de la concession.
En 2006, Oji chargea la Global Environment Centre Foundation de faire une étude de faisabilité pour savoir comment elle pourrait obtenir des crédits de carbone en application du Mécanisme de développement propre (MDP). Le rapport montre les villageois en train de pratiquer « l’agriculture sur brûlis, qui est illégale », et remarque qu’ils n’ont « aucun autre moyen de se procurer des aliments ».
Le rapport de la Global Environment Centre Foundation dit que « les habitants de la zone étudiée continuent de pratiquer l’agriculture sur brûlis et que la régénération spontanée de la forêt ne peut pas avoir lieu en raison de la dégradation des terres ».
Comme le signale Barney, le rapport omet de dire que les villageois de Ban Pak Veng pratiquaient « l’agriculture sur brûlis non pas par tradition mais surtout parce que le barrage de la THPC (Theun Hinboun Power Company) les avait privés d’accès aux rizières des basses terres ».
Barney ajoute que l’étude de faisabilité du MDP « passe sous silence au moins vingt années de recherches menées au Laos sur l’importance de l’agriculture d’altitude et des produits forestiers non ligneux pour l’économie rurale ». Il a documenté de façon détaillée les rapports complexes des villageois avec leur terre et leurs forêts, et remarqué que les fonctionnaires étatiques chargés de dresser les cartes pour le programme de réforme agraire « n’emploient pas du tout les mêmes termes que les villageois pour parler du paysage et des forêts ».
Malheureusement, il faut s’attendre à ce que l’étude de faisabilité de projets REDD sur les plantations d’Oji Paper commette les mêmes erreurs. Les consultants n’ont aucun intérêt à découvrir et documenter ce qui se passe vraiment dans le milieu rural du Laos. En revanche, ils ont tout intérêt à réduire des situations sociales et environnementales complexes à de simples questions de légalité ou d’illégalité. De même, ils vont ignorer les moyens d’existence de la population locale. « Ainsi, on est en train de soumettre les paysans du Laos à une nouvelle série de dangers, tout en leur enlevant le filet de sauvetage que représente leur accès aux ressources naturelles », écrit Barney à propos des plans MDP d’Oji Paper.
En 2006, un villageois avait dit : « Nous n’avons pas de terre. Oji nous l’a prise ». Un autre avait dit à Barney : « Nous sommes en train de dire adieu à nos forêts ».
Si l’entreprise responsable de cette destruction peut maintenant affirmer qu’elle réduit les émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts, cela veut dire que le concept de REDD a perdu toute qualité intellectuelle et morale.
Chris Lang, http://chrislang.org
[1] L’auteur remercie Mekong Watch de sa traduction du japonais à l’anglais.
L’occasion du changement indispensable
A cette croisée de chemins planétaire, des voix montent des peuples qui réclament l’indispensable changement de direction.
Cela s’est matérialisé dans l’« Accord des Peuples » élaboré de façon participative lors de la Conférence mondiale des peuples sur le changement climatique et les droits de la Terre-Mère, qui s’est tenue en avril 2010 à Cochabamba, Bolivie. Des milliers de participants furent d’accord que « Pour faire face au changement climatique, nous devons reconnaître la Terre-Mère comme la source de la vie, et forger un nouveau système », qui serait basé sur une série de principes, parmi lesquels « l’harmonie et l’équilibre entre tous et avec tout », « la complémentarité, la solidarité et l’équité », « l’élimination de toute forme de colonialisme, d’impérialisme et d’interventionnisme ». On réaffirme ainsi l’idée que la nature a des droits qui doivent être respectés, et que les biens et les services nécessaires pour satisfaire les besoins des populations ne peuvent être obtenus au prix de sa destruction.
En ce qui concerne la crise climatique, l’Accord affirme : « Nous, les peuples, avons les mêmes droits de protection face aux effets du changement climatique, et nous refusons la notion d’adaptation au dit changement entendue comme la résignation aux résultats provoqués par les émissions historiques des pays développés, qui doivent adapter leur style de vie et de consommation devant cette urgence planétaire. Nous nous voyons forcés à faire face aux effets du changement climatique, en considérant l’adaptation comme une méthode et non comme une imposition, et en plus comme un outil qui serve à contrer ces effets, en démontrant ainsi qu’il est possible de vivre en harmonie dans un modèle de vie différent ».
Lorsque la réflexion sur les politiques qui traitent les vraies causes du problème, il serait nécessaire, comme l'a déclaré GenderCC que “les politiques et les mesures visant à atténuer le changement climatique partaient d’une vision holistique des points de vue, des valeurs et des choix comportementaux. Cela comporterait de considérer ce qui est spécifique à chaque groupe social, celui des hommes et celui des femmes. Si les politiques sont conçues pour répondre aux intérêts et aux besoins des hommes et des femmes et pour aller dans le sens de l’égalité des sexes, elles seront plus efficaces”.
Le changement essentiel, qui est façonné pour les peuples du monde, doit être basée sur le concept de souveraineté alimentaire qui implique le soutien à l'agriculture paysanne et familiale.
L’organisation mondiale La Vía Campesina dit que, selon le GIEC, l’agriculture industrielle est une des principales causes de l’augmentation du volume des gaz à effet de serre. Ce type d’agriculture à caractère intensif, basée sur une augmentation du rendement grâce à la monoculture à grande échelle, à la concentration de la possession de la terre et à l’utilisation massive d’engrais synthétiques et de produits agrochimiques, contribue à la catastrophe climatique, d’une part par l’usage intensif de l’énergie fossile qu’elle demande, et d’autre part à cause des processus de déboisement qu’elle provoque au moment de s’étendre et d’occuper des territoires.
Face à cela, La Vía Campesina lance un appel à « abandonner le chemin de l’agriculture industrielle destructrice, polluante et génératrice d’inégalité, et à miser en revanche sur les communautés paysannes et indigènes pour alimenter l’humanité et refroidir la planète » (18).
Et elle ajoute : « la recherche scientifique montre que les peuples paysans et indigènes pourraient réduire les émissions globales actuelles à 75% en augmentant la biodiversité, en récupérant la matière organique du sol, en substituant la production industrielle de viande par une production diversifiée à petite échelle, en fortifiant les marchés locaux, en stoppant le déboisement et avec une gestion intégrale de la forêt.
L’agriculture paysanne non seulement contribue positivement à l’équilibre du carbone de la planète, mais elle crée aussi 2 800 millions de postes de travail, pour des hommes et des femmes du monde entier, et c’est la meilleure façon de lutter contre la faim, la dénutrition et la crise alimentaire actuelle.
Le plein droit à la terre et la récupération des territoires, la souveraineté alimentaire, l’accès à l’eau comme bien social et comme droit de l’homme, le droit à utiliser, conserver et échanger librement les semences, la déconcentration et l’encouragement des marchés locaux, sont des conditions indispensables pour que les peuples paysans et indigènes puissions continuer à alimenter le monde et à refroidir la planète ».
Les peuples peuvent faire du Sommet de Cancun un autre espace pour y renforcer l’intégration des mouvements sociaux, pour élaborer des actions et des stratégies communes et pour marcher vers le changement indispensable.
1 - Climate change: evidence from the geological record, The Geological, position statement on climate change,http://www.geolsoc.org.uk/gsl/views/policy_statements/climatechange.
2 - Site officiel de la Conférence : http://cmpcc.org .
3 - Conclusions du Groupe de travail 8 sur la dette climatique :http://cmpcc.org/2010/04/28/conclusiones-grupo-de-trabajo-8-deuda-climatica/#more-1840.
4 - “Winner of Project Consored top 25 articles for 2009 - 2010 news stories: Pentagon's role in global catastrophe”, Sara Flounders, International Action Center,http://www.iacenter.org/o/world/climatesummit_pentagon121809.
5 - The Rich: Our Biggest Carbon Problem, Barry Saxifrage, 12 de febrero de 2009,http://www.saxifrages.org/eco/go19a/The_Rich_Our_Biggest_Carbon_Problem.
6 - http://www.breathingearth.net.
7 - Broder 2009, cité dans “The End of ‘Cheap Ecology’ and the Crisis of ‘Long Keynesianism’,” Farshad Araghi, 23 janvier 2010, Economic and Political Weekly, distribué par Larry Lohman.
8 - Organisation internationale pour les migrations, http://www.iom.int/jahia/Jahia/about-migration/facts-and-figures/lang/fr;jsessionid=C3C2472FE6670907410C4A2C22F50D8A.worker02.
9 - “Murder on the Carbon Express: Interpol Takes On Emissions Fraud”, Marck Schapiro pour Mother Jones, 8 octobre 2010,http://motherjones.com/environment/2010/10/interpol-carbon-trading-fraud.
10 - D’après CO2Now, http://co2now.org/.
11- Potential Impacts of Tree Plantation Projects under the CDM. An African Case Study, 07/10/2010, Blessing Karumbidza y Wally Menne, The Timberwatch Coalition,http://timberwatch.org/uploads/Draft%20Plantation_Projects_under%20CDM%20-%20Blessing%20&%20Wally%281%29.pdf.
12 - “Could Biochar save the world?”, Jeremy Hance, 16/08/2010, http://bit.ly/cALKwk.
13 - “Biochar, una nueva amenaza para los pueblos, la tierra y los ecosistemas”, déclaration : http://www.wrm.org.uy/temas/Agrocombustibles/Biochar.pdf.
14 - “Geoengineering the planet: What is at stake for Africa?”, Diana Bronson, ETC Group, http://pambazuka.org/en/category/features/67522.
15 - “The new biomassters and their assault on livelihoods”, Jim Thomas, ETC Group, 07/10/2010, http://pambazuka.org/en/category/features/67535.
16 - “Driving to destruction. The impacts of Europe’s biofuel plans on carbon emissions and land”, novembre 2010,http://www.foeeurope.org/agrofuels/ILUC_report_November2010.pdf
17 - http://cmpcc.org/acuerdo-de-los-pueblos/.
18 - “¡Miles de Cancún por la justicia climática!”, septembre 2010, déclaration de La Vía Campesina, http://tinyurl.com/2c3qqm2