Au cours des 10 dernières années, le gouvernement indonésien a délivré de nombreux permis d'exploitation minière, prétextant qu'il renforce ainsi la croissance et la position concurrentielle du pays au niveau de l'Asie et à l'échelle internationale. Selon les données du Ministère de l'Énergie et des Ressources minérales, environ 10 918 permis d'exploitation ont été délivrés par les autorités du gouvernement central, des provinces et des districts. De plus, 41 permis pour des Contrats d'exploitation et 75 permis ont été attribués spécifiquement pour le charbon avec différentes superficies en hectares données à bail à des entreprises nationales et multinationales (1). On assiste actuellement à une multiplication du nombre de permis d'exploitation minière dans tout le pays. Dans la région de Sumatra 3 058 permis ont été attribués, 3 907 dans la région de Kalimantan, 1 591 dans la région de Sulawesi, 438 dans la région des îles Moluques, 246 dans la région de la Papouasie, 467 dans celle de Bali Nusa Tenggara et 1 334 dans la région de Java.La dégradation de l'environnement liée à cette expansion est également observée dans tout le pays. On l'observe non seulement dans les forêts et les terres communautaires, mais aussi sur les côtes et dans les petites îles indonésiennes. Les objectifs d'extraction et de production minière augmentent chaque année, parallèlement à l'accroissement du taux de dégradation environnementale. Les dégâts causés par les entreprises du secteur minier concernent déjà toutes les régions du pays. Cependant, les mines artisanales, dont le nombre augmente lui aussi rapidement dans tous le pays, causent également des dommages. Les mines créent des problèmes, non seulement pendant l'extraction et le traitement des minéraux, mais aussi au cours de la première phase des opérations, qui porte sur les zones de production des communautés d'agriculteurs et de pêcheurs, largement exploitées par les entreprises et qui sont donc expropriées.Les problèmes liés à l'exploitation minière sont sensiblement les mêmes en termes de type et de caractéristiques. Il s'agit par exemple de la criminalisation des populations locales opposées aux projets de l'appareil d'État et des dommages écologiques importants qui génèrent des impacts négatifs sur les conditions environnementales et les moyens de subsistance des populations. L'île de Bornéo est un exemple très préoccupant en termes de dommages écologiques, en raison des impacts de l'extraction continue de charbon, qui vise à répondre à la demande mondiale en charbon - ainsi qu'à la demande nationale d'énergie, toujours fortement dépendante du charbon.
La production de charbon de l'Indonésie a continué d'augmenter jusqu'en 2014. Les données sur la production de charbon indonésienne au cours des 5 dernières années indiquent qu'en 2010 sa production s'élevait à 325 millions de tonnes, à 371 millions de tonnes en 2011, 386 millions de tonnes en 2012, 421 millions de tonnes en 2013, 435 millions de tonnes en 2014, et l'objectif du gouvernement indonésien pour 2015 est de parvenir à 420 millions de tonnes. Une fois que l'on arrive à l'épuisement du ou des minerais extraits sur un site, ce qui reste présente alors également une menace pour les communautés, car les anciens sites miniers sont abandonnés sans qu'aucun effort soit fait pour la réhabilitation des zones ou la fermeture appropriée des puits de mine. Dans la ville de Samarinda, dans le Kalimantan occidental, par exemple, certains puits de mine ont déjà entraîné la mort de plusieurs personnes car les eaux stagnantes qui couvrent la mine sont ensuite utilisées comme un petit lac et un terrain de jeux pour les enfants. À ce jour, 10 enfants sont déjà morts après avoir joué et nagé dans la zone. Même si cette situation s'est déjà reproduite à de nombreuses reprises, les autorités locales et les entreprises qui ont abandonné les sites ne prennent aucune mesure pour éviter que ce type d'événement se produise, par exemple, en refermant immédiatement la cavité, ou en assurant la sécurité autour de la zone afin que les gens n'accèdent plus au site.
Les pêcheurs des îles de Bangka Belitung, où l'on produit la majeure partie de l'étain utilisé par le secteur électronique au niveau mondial, ont aussi été fortement affectés par les activités d'extraction de l'étain, puisqu'elles sont menées en mer, dans les zones de pêche. La plus grande entreprise encore en activité aujourd'hui est « PT Timah Tbk », une société appartenant à l'État qui poursuit l'expansion de ses activités minières offshore, avec plusieurs entreprises privées qui font de l'extraction minière d'étain offshore dans de petites zones de pêche utilisées par les populations locales de pêcheurs. On estime qu'environ de 3000 dragues aspiratrices sont actuellement en activité autour de l'île de Bangka. Plusieurs communautés de pêcheurs ont fréquemment protesté contre le gouvernement et l'entreprise parce que leurs moyens d'existence sont affectés, que leurs revenus ont fortement baissé et que les stocks de poissons potentiellement disponibles sont de plus en plus limités. Ils sont même confrontés à des problèmes ne serait-ce que pour trouver assez de poisson pour répondre aux besoins alimentaires de leurs propres familles. En outre, l'écosystème corallien est gravement perturbé et sa fonction de zone de fraie a aussi été dégradée par l'accroissement de la turbidité des eaux marines et la boue et les sédiments qui recouvrent les récifs coralliens.On observe de plus en plus de conflits sur l'île de Sulawesi, où l'entreprise a pour stratégie de susciter et créer des dissensions entre les résidents locaux. Pour cette raison, l'État a dû mettre en place un dispositif de sécurité pour protéger l'entreprise.À l'échelle nationale, la superficie couverte par le secteur minier a atteint 3,2 millions d'hectares et appartient à 1 755 entreprises dont les actionnaires sont à la fois des ressortissants indonésiens et des étrangers. Pour WALHI, une ONG écologiste indonésienne, le plus gros problème avec les compagnies minières est la destruction de l'environnement liée à leur comportement de prédateurs, ainsi que leur « collaboration » mutuelle avec le gouvernement. La catastrophe écologique provoquée par les activités minières a des répercussions énormes, par exemple des inondations dues à la diminution du bassin hydrographique, des glissements de terrain, des dégâts sur les terres agricoles entraînant de mauvaises récoltes ou la pollution des rivières et des zones côtières.Les hautes terres de l'île de Papouasie ont pendant des décennies été contrôlées par la société minière américaine « PT. Freeport Indonesia », qui a entraîné d'incroyables dommages environnementaux. En outre, les activités minières menacent les populations autochtones vivant dans les montagnes ainsi que la vie des populations autochtones Kamoro, qui vivent sur la côte.Les zones côtières ont été utilisées pendant des années comme des sites de décharge par l'entreprise. Les Kamoro sont maintenant obligés de vivre au quotidien avec des déchets toxiques.La consommation des aliments locaux est également touchée et il a été prouvé que ces derniers sont contaminés par des métaux lourds. Maintenant, les Kamoro sont à nouveau obligés de lutter pour résister à un plan de développement industriel de l'entreprise, qui consiste notamment à installer une fonderie dans leurs territoires traditionnels. Le plan de l'entreprise est soutenu par le gouvernement. Cependant, le chef du peuple Kamoro a déclaré que la population refuse le plan et qu'elle est prête à se battre si l'on y donne suite. Le peuple Kamoro ne veut pas ajouter d'autres problèmes à ceux que les prochaines générations devront déjà gérer : les déchets produits par l'industrie. En plus du projet de construction de fonderie, le gouvernement compte également bâtir une cimenterie et d'autres usines, qui viendraient encore marginaliser la vie communautaire de la population autochtone des Kamoro en Papouasie.
Les îles Moluques du nord de l'Indonésie, qui font également l'objet de pressions importantes du secteur minier, offrent également un exemple éclairant. Le projet « Weda Bay Nickel », du groupe minier et métallurgique français ERAMET, entraîne actuellement des dommages environnementaux graves et des conflits communautaires, parmi lesquels la criminalisation des populations par les forces de sécurité.Les îles de Nusa Tenggara (Petites Îles de la Sonde) font aussi l'objet de pressions de plus en plus fortes des nombreuses exploitations minières de manganèse présentes dans la région. Cela a entraîné des conflits avec les peuples autochtones en raison de la destruction et de la pollution de leurs terres agricoles, et de la destruction de leurs moyens de subsistance.
L'environnement global de l'Indonésie continuera à être menacé et détruit par le secteur minier si le gouvernement ne procède pas immédiatement à une révision complète de tous les permis d'extraction minière. Les entreprises qui seront reconnues coupables de cette destruction et ont exercé leurs activités au mépris de la vie des communautés locales devront cesser immédiatement leurs activités et être poursuivies pour leurs actes criminels.En outre, le gouvernement délivre actuellement trop de permis d'exploitation minière. Compte tenu de tous les impacts négatifs enregistrés dans tout le pays, il est essentiel de mettre un terme à cela afin de permettre aux communautés et à l'environnement de faire face à ces impacts, de commencer un processus de réhabilitation du bien-être des communautés à tous les niveaux, et de remettre en état, physiquement et écologiquement, les terres qui étaient exploitées auparavant par les communautés locales.
Edo Rakhman, edowalhisulut@gmail.com
Walhi, http://www.walhi.or.id/
(1) Les « Contrats d'exploitation » (« Contracts of Work ») et les « Contrats d'exploitation pour l'extraction du charbon » (« Contracts of Work for Coal Mining ») sont délivrés par le gouvernement indonésien et sont distincts des permis d'exploitation minière.