Début mars 2005, le premier projet de puits de carbone promu par le Fonds “biocarbone” de la Banque mondiale est entré dans la première étape de son enregistrement en tant que projet MDP du Protocole de Kyoto. À peu près à la même date, un formulaire a été publié sur le site Web de la Banque mondiale pour les finances du carbone, à l'intention des responsables de projets de puits, pour qu'ils puissent estimer les taux d'absorption de leurs plantations. Pour montrer comment remplir certaines cases, le formulaire utilise des exemples un tant soit peu irrévérencieux ; par exemple, dans la section « Contact (adresse électronique de préférence) », l'exemple donné est « fred@data_fiddling_Inc.jail.com » qui pourrait se traduire par « fred@faux_renseignements_en.taule.com ».
SinksWatch affirme depuis longtemps que les calculs pour déterminer le flux du carbone dans une forêt, nécessaires pour calculer les crédits carbone correspondants, sont erronés et que, d'ailleurs, les chiffres ne peuvent pas être vérifiés à cause de la façon complexe et variable dont le carbone circule entre les forêts, l'atmosphère et les océans. Ces échanges naturels sont différents dans les cas du carbone biologique (par exemple, celui des arbres) et du carbone fossile (par exemple, celui qui se dégage de la combustion d'éléments fossiles) qui, sans l'intervention humaine, atteindra rarement l'atmosphère. En outre, le stockage de carbone dans les arbres étant temporaire, les plantations d'arbres qui fonctionnent aujourd'hui comme des ‘puits de carbone' pourraient très bien devenir des ‘sources de carbone' dans un avenir proche. Sten Nilsson, de l'Institut international pour l'analyse des systèmes appliqués (IIASA, Autriche), avait déjà signalé dans une publication de 2000 que l'état des connaissances au sujet des sources et des puits de carbone ne permettait pas de déterminer les taux et les flux de carbone avec une précision suffisante pour fonder là-dessus le Protocole de Kyoto ou un quelconque projet de commercialisation qui soit viable.
Or les défenseurs des projets de puits de carbone tels que le Fonds « biocarbone » ne tiennent pas compte de tout cela et prétendent que les calculs qui figurent dans les documents techniques de leurs projets sont d'une exactitude qui, d'après de nombreux scientifiques, est impossible à atteindre.
Mais il se peut que fred@faux_renseignements_en.taule.com commence à douter du discours de l'unité de financement du carbone de la Banque mondiale. Peut-être s'inquiète-t-il des risques potentiels d'une telle affaire. Lors de la CoP-10 de Buenos Aires, en décembre 2004, l'entreprise de fabrication de ciment Holcim – qui avait participé au développement de projets MDP mais s'en est ensuite retirée – a déclaré que le MDP, tel qu'il est à l'heure actuelle, va créer « de nouvelles Enron chez les promoteurs de projets » et « de nouvelles Arthur Andersen chez les vérificateurs comptables et les analystes financiers ». Finiraient-ils en.taule.com ?
Jutta Kill, SinksWatch, adresse électronique : jutta@fern.org