La Conférence des Parties à la Convention sur le Changement climatique de l’ONU se réunira ce mois-ci à Buenos Aires, Argentine. A travers les médias, le public recevra la bonne nouvelle que le Protocole de Kyoto a été approuvé malgré le refus du plus grand pollueur du monde – les États-Unis – de le ratifier. La plupart de gens se sentiront soulagés, croyant que la crise climatique pourra maintenant être évitée.
Malheureusement, la réalité de la situation est très différente. D’abord, la réduction des émissions que le Protocole de Kyoto a fixée pour les pays industrialisés n’est que de 5,2 % au-dessous des niveaux de 1990, ce que la plupart des scientifiques estiment tout à fait insuffisant pour enrayer effectivement le réchauffement de la planète. D’autre part, cette obligation, toute inadéquate qu’elle est, peut même être contournée : ces pays peuvent acquérir le droit d’émettre davantage de dioxyde de carbone, par exemple, en établissant des monocultures d’arbres comme « puits de carbone ».
Cet état de choses, qui est surtout le résultat des pressions exercées par des entreprises puissantes lors des négociations sur le climat, a poussé les représentants des organisations et des mouvements populaires du monde entier à se réunir à Durban, Afrique du Sud, en octobre 2004, pour chercher des manières plus réalistes de s’attaquer au changement climatique. De cette rencontre est issu un appel à la formation d’un mouvement mondial de base contre le changement climatique (voir la Déclaration de Durban sur http://www.wrm.org.uy/actors/CCC/action.html).
Les participants ont conclu que la tentative de Kyoto de fixer un prix au carbone « ne sera pas plus efficace, plus démocratique ou plus favorable au bien-être humain que de fixer un prix aux gènes, aux forêts, à la biodiversité ou aux rivières propres ».
Par la même occasion, le Groupe de Durban a réaffirmé que « la réduction drastique des émissions provenant de l’utilisation de combustibles fossiles est une condition préalable » pour combattre la crise climatique ; il a déclaré qu’il avait la « responsabilité à l’égard des générations futures de chercher des solutions réelles, qui soient viables et vraiment durables et qui ne sacrifient pas les communautés marginalisées ».
Le Groupe s’est engagé à « soutenir la création d’un mouvement mondial de base pour la justice climatique, à mobiliser les populations du monde entier et à [se] solidariser avec ceux qui s’opposent sur le terrain au commerce du carbone ».
Les participants ont convenu de déclarer le 10 décembre (Jour des droits de l’homme) « Journée internationale d’action pour le climat », pour bien montrer que le droit à un climat supportable est un droit essentiel de l’homme, et que ce droit est violé par les mêmes gouvernements qui prétendent lutter contre la crise climatique.
Le WRM adhère pleinement à ces points de vue. Dans ses campagnes contre les monocultures d’arbres il a toujours soutenu que leur plantation non seulement n’allait pas ralentir le changement climatique mais allait apporter de nouveaux problèmes aux gens qui habitent les régions destinées à recevoir ces soi-disant puits de carbone.
Ce sont les gens simples et vulnérables qui vont le plus pâtir de la passivité des gouvernements et de la convoitise des entreprises, à moins qu’on fasse quelque chose, tout de suite, pour éviter la destruction environnementale et la souffrance humaine que le changement climatique provoquera. Le WRM est fermement convaincu que, pour parer la crise, les peuples du monde doivent reprendre en main le problème du climat. Ce ne sera pas le Protocole de Kyoto, mais les gens, qui sauveront le climat.