Papouasie-Nouvelle Guinée: des groupes environnementalistes pressent le Premier Ministre de prendre des mesures contre un projet forestier

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Plusieurs ONG et Groupes Pacifistes, ainsi que des groupes australiens et internationaux, ont publié une lettre ouverte adressée au Premier Ministre de la Papouasie-Nouvelle Guinée, Sir Michael Somare, dans laquelle ils expriment leur "profonde inquiétude et leur frustration croissante à propos de la situation actuelle de la gestion du secteur forestier en Papouasie-Nouvelle Guinée, et ses conséquences débilitantes sur l'économie et la sécurité de la nation". La lettre présente les faits qui sont à la base de leur inquiétude, et demande au gouvernement d'agir.

L'un des aspects conflictuels est la manière dont l'affaire de Kiunga-Aiambak a été conduite (cf. Bulletins 53 et 55 du WRM). Une autorisation d'abattage avait été accordée à une entreprise locale pour la construction d'une route reliant les centres provinciaux de Kiunga et Aiambak dans la Province Occidentale. Cette compagnie avait à son tour sous-traité l'affaire avec Concord Pacific, une société forestière appartenant à des groupes d'intérêt malais. Il a vite été évident que le projet routier n'était qu'un prétexte, pour se procurer une large concession forestière. Un peu plus tard, en 1994, Concord Pacific a obtenu une prorogation de cinq ans et l'autorisation de récolter jusqu'à 210 000 mètres cubes de bois par an, ce qui a fait de l'opération l'une des activités extractives les plus volumineuses de la PNG.

Les propriétaires terriens de Kiunga Aiambak ont perdu leurs terres et leurs ressources forestières aux mains d'une compagnie malaise âpre au gain, en échange... de quoi? Arnold Kombo, leader communautaire de Nangumarum, province d'East Sepik, raconte: "Ils faisaient de l'abattage à un endroit où il y avait déjà eu tant de destruction, avec des camions qui ouvraient des routes secondaires. Il y avait des dégâts tels que des arbres coupés inutilement, des plantes et des arbrisseaux rasés, ils finissaient par laisser la terre pelée et puis des herbes y poussaient, à la place des arbres. Dans certains endroits les sources se sont taries et les gens devaient aller très loin chercher de l'eau". L'infirmière Yatamara, responsable du Centre de Santé de Baboa, dit: "Personne ne se soucie de cet endroit, nous sommes des gens oubliés et le gouvernement ne nous a aidés en rien. Avant, les gens disaient qu'ils pouvaient voir les poissons dans l'eau, qu'ils pouvaient se peigner les cheveux en se regardant dans l'eau. Maintenant vous pouvez voir que l'eau est vraiment boueuse, et lorsque les gens vont dans les endroits où pousse le sago il n'y a pas d'eau propre, donc ils boivent l'eau qu'ils trouvent et tombent malades, ils ont des douleurs stomacales, des saignements, ces gens sont très malades".

En 1999, le gouvernement de la PNG a fait une tentative mi-sérieuse pour arrêter l'extraction illégale le long de la route de Kiunga-Aiambak. Une action légale s'est ensuivie, avec beaucoup de retards. Entre-temps, l'abattage s'est poursuivi sans entraves, sur les bords de la route et loin à l'intérieur de la forêt.

En décembre 2002, un Acte de Colonisation a été présenté à la Cour nationale. Son intention est de légitimer l'exploitation illégale ininterrompue des ressources et porterait atteinte à la souveraineté de la Papouasie-Nouvelle Guinée et aux droits de son peuple.
Ces derniers jours, le Ministre des forêts a déclaré que la route Kiunga-Aiambak est "définitivement illégale" et que la position du gouvernement est claire: "nous n'allons pas approuver l'Acte de Colonisation", et l'on va "révoquer sans délai l'autorisation d'exploitation forestière de Kiunga-Aiambak".

Les organisations signataires exigent au Premier Ministre de respecter les affirmations du gouvernement et d'agir de manière effective. Elles suggèrent certaines mesures qui sont bien du domaine gouvernemental:

- Annuler l'Acte de Colonisation par l'intervention des tribunaux, l'application des lois ou tout autre moyen disponible.
- S'assurer que toutes les parties impliquées dans cet accord corrompu et que tous ceux qui auront pris part à des actions criminelles feront l'objet d'une enquête indépendante.
- Mettre fin aux activités actuelles de Concord Pacific et ordonner qu'elles n'aient plus lieu en Papouasie-Nouvelle Guinée.
- S'assurer que l'Autorisation d'exploitation forestière ne sera accordée à aucune autre compagnie.
- S'assurer qu'aucune prolongation du projet routier ne sera approuvée par la voie légale ou autrement.

La lettre prévient que "AusAID a récemment reconnu l'existence d'une décennie perdue dans le développement de la PNG à cause de la corruption et de la mauvaise gestion. Les questions mentionnées mettent en lumière que l'industrie forestière a joué un rôle essentiel dans cette perte. A moins que le gouvernement n'agisse avec décision et fermeté, nous verrons encore une décennie de perdue". (La version intégrale de la lettre -en anglais- est disponible dans: www.wrm.org.uy/countries/PapuaNG/PNGletter.rft )
Article basé sur des informations tirées de: "Open letter to The Right Honourable Sir Michael Somare. Subject: Forest sector and Kiunga Aiambak Road Deed of Settlement". Envoyé par Stephen Campbell, Greenpeace, adresse électronique: stephen.campbell@au.greenpeace.org; "Logged out, paradise lost", http://www.paradiseforest.org/paradise_lost/kiunga_aiambak_road.php.