Brésil : demande d’explications au FSC, à Imaflora/Smartwood et à Aracruz

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Le 1er juin 2006 a eu lieu à Vitória, dans l’État brésilien d’Espírito Santo, le séminaire « Les droits des peuples autochtones et l’avancée des agro-industries : problèmes et défis ». À ce séminaire ont participé les communautés tupinikim et guarani et d’autres populations affectées par les grandes plantations d’arbres en régime de monoculture, ainsi que plusieurs secteurs de la société civile de l’État, pour réfléchir sérieusement à la question.

Les discussions ont porté sur l’inadéquation absolue du modèle actuel de développement qui découle de l’expansion, dans les zones rurales du Brésil, de grandes monocultures d’eucalyptus, de pins, de soja et de canne à sucre. Il est urgent de modifier ce modèle, en commençant par financer des activités productives d’un genre tout à fait différent, accordant la priorité à la vie, à la diversité, aux personnes et communautés affectées par les monocultures d’arbres à grande échelle, et surtout aux femmes, qui sont celles qui souffrent le plus les effets de ces plantations.

L’accent a été mis sur le cas d’Aracruz Celulose. Cette entreprise avait essayé, en 1999, d’obtenir le certificat FSC pour ses plantations d’eucalyptus dans l’État de Bahia, mais une forte et massive mobilisation d’organisations, communautés, mouvements et citoyens avait réussi à l’éviter. Par la suite, l’entreprise a « acheté » ce certificat en 2003, en achetant à la société Riocell près de 40 000 hectares situés dans l’État de Rio Grande do Sul, dont les plantations avaient été certifiées par le FSC en 2001. Pourtant, grâce à l’intervention des Tupinikim et des Guarani auprès du secrétariat international du FSC, l’entreprise a annoncé qu’elle avait pris elle-même l’initiative de « demander l’annulation du certificat FSC ».

L’entreprise n’ayant jamais reçu de sanction, les communautés locales se demandent comment il est possible qu’elle ait réussi à conserver pendant trois ans, dans cette région, un certificat qui exige de respecter les droits des peuples autochtones et leurs terres, alors que, dans une autre région, elle viole ces mêmes droits.

À présent, les communautés réclament « les explications nécessaires sur ce qui s’est passé au sujet des parties impliquées :

1. Le FSC. Pourquoi le FSC a-t-il permis à Aracruz de maintenir depuis 2003 le certificat, alors que cette entreprise occupait des terres indigènes ? Pourquoi le FSC n’est-il pas intervenu lorsque les communautés indigènes ont délimité elles-mêmes leurs terres en mai 2005, et qu’elles ont été violemment expulsées de deux villages, en janvier 2006 ? À cette dernière occasion, la maison d’hôtes d’Aracruz a été utilisée comme quartier général de la police fédérale et comme commissariat, et deux Indiens y ont été emprisonnés pendant plusieurs heures. Le FSC croit-il qu’une telle entreprise mérite d’être certifiée, ne serait-ce que pour une journée ?
2. Aracruz Celulose. L’entreprise est en train de divulguer l’information qu’il n’y a jamais eu d’Indiens dans ses terres, et affirme avec conviction qu’elle a légalement acheté ses terres en Espírito Santo, y compris les terres indigènes. Si cela est vrai, pourquoi a-t-elle décidé de renoncer au certificat du FSC ?
3. Imaflora/Smartwood. Pourquoi Imaflora/Smartwood n’a pas évalué l’entreprise Aracruz Celulose lorsque celle-ci a acheté l’entreprise Riocell ? Pourquoi lui a-t-elle permis de garder le certificat pendant près de trois ans, alors qu’Aracruz occupait des terres indigènes à Espírito Santo et qu’il y avait des informations en abondance à ce sujet sur l’Internet ?

Nous réclamons que les trois acteurs impliqués dans cette affaire s’expliquent publiquement. Et nous espérons que le FSC n’autorisera plus à l’avenir la certification d’unités d’aménagement forestier gérées par des entreprises qui violent les droits de l’homme et/ou mettent en danger les communautés locales, qu’il s’agisse d’indigènes, de quilombolas, de pêcheurs ou de paysans. Il est temps que le FSC oeuvre pour la promotion d’une gestion forestière diversifiée et solide, qui bénéficie tout le monde. Il dispose d’une excellente occasion de ce faire, maintenant qu’il a entrepris la révision de ses normes de certification en matière de plantations d’arbres. »

Extrait de la lettre ouverte “The harshness of capital against life --but Aracruz Celulose lost the FSC-certificate!”, publiée par le mouvement ‘Alerta contra o Deserto Verde’ le 4 juillet 2006 (http://www.wrm.org.uy/countries/Brazil/Open_Letter_Aracruz.html). Pour de plus amples informations sur le processus de révision du FSC au Brésil, voir “Documento para o Grupo Internacional de Revisão dos Princípios e Critérios do FSC para plantações de árvores” (en portugais, http://www.wrm.org.uy/paises/Brasil/Carta_Revisao_FSC.pdf)