Inde : la réponse des femmes à la dévastation causée par les mines

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L’industrie minière a des effets dévastateurs sur les gens et l’environnement mais, dans le cas spécifique des femmes, elle a des conséquences encore plus graves (voir bulletins nº 71 et nº 79 du WRM). En effet, en plus de provoquer la déforestation et la contamination de la terre, des fleuves et de l’air par des déchets toxiques, l’exploitation minière détruit les espaces culturels et privés des femmes et les prive de leur infrastructure de socialisation et de leur rôle dans la société, le tout pour le bénéfice d’une poignée de grandes sociétés.

Dans le cas de l’Inde, lorsque les projets miniers déplacent des villages les femmes sont laissées sans protection puisque, n’ayant aucun droit sur la terre ou les ressources naturelles, elles ont encore moins de possibilités de réclamer une quelconque réhabilitation ou compensation. Les forêts sont abattues pour faire de la place aux mines et à l’infrastructure correspondante, le plus souvent sans respecter les lois et les accords internationaux portant sur les droits humains, y compris les droits ancestraux et culturels des peuples autochtones. De ce fait, les femmes sont coupées de leurs rôles économiques traditionnels et perdent le droit de cultiver leurs récoltes coutumières ou de cueillir les produits de la forêt pour la consommation domestique ou à des fins médicales. Plongées dans une économie monétaire qui leur est étrangère, elles peuvent n’avoir d’autre recours que de travailler comme domestiques ou tomber dans la prostitution. Elles se voient en plus confrontées à des maux sociaux qui n’existaient pas auparavant, tels que les mauvais traitements de la part de leurs maris, l’alcoolisme, l’endettement, le harcèlement physique et sexuel, qui deviennent monnaie courante dans les communautés minières comme dans celles qui subissent les effets de cette industrie.

De par sa nature même, l’activité minière n’offre pas de place au travail féminin. Elles perdent donc leur indépendance, puisqu’elles ne comptent plus que sur le salaire des hommes. Lorsqu’elles y sont embauchées (dans les mines de faibles dimensions du secteur privé) elles sont les premières à être renvoyées, ne bénéficient d’aucune mesure de sécurité dans le travail, et sont soumises à des risques graves pour leur santé qui affectent aussi leur capacité d’avoir des enfants sains. D’autre part, dans les cas où elles sont employées dans les activités minières les conditions de travail les exposent à l’exploitation sexuelle.

Les violations des droits humains à l’encontre des femmes qui travaillent dans les mines ou sont affectées par cette industrie ont augmenté de manière effrayante avec l’entrée des grands capitaux et des compagnies privées (voir bulletins nº 40 et nº 52 du WRM), sans réaction aucune de la part du gouvernement. Au contraire, les protestations et la résistance des victimes ont reçu de l’État une réponse violente.

Néanmoins, de nombreuses luttes et campagnes isolées visant à protéger les droits des femmes, menées par des communautés, des travailleurs et des défenseurs des ressources naturelles et de l’écologie, essaient à l’heure actuelle de se rassembler pour faire entendre leur voix et agir de manière collective contre l’exploitation des femmes et leur éloignement de leur milieu.

C’est ainsi qu’une alliance nationale a été créée, dénommée « les mines, les minéraux et les PERSONNES » (mm&P). L’un des groupes principaux de cette alliance est le Réseau national sur les femmes et les mines de l’Inde, dont le but est de s’attaquer aux problèmes des femmes travaillant dans les mines ou appartenant à des communautés affectées par l’industrie minière. A son tour, ce réseau est membre du Réseau international sur les femmes et les mines (International Network of Women and Mining), et de son bureau de coordination pour la région Asie-Pacifique.

Les objectifs du réseau sont les suivants :

* Connaître la situation des femmes travaillant dans les mines ou affectées par elles.
* Travailler pour défendre les droits des femmes travaillant dans les mines et de celles qui ont été déplacées ou affectées par cette industrie.
* Oeuvrer dans le sens d’une lutte collective destinée à la mise en place dans le pays d’une politique minière qui tienne compte des questions de genre.
* Rejoindre les luttes et les campagnes nationales et internationales en faveur des femmes, particulièrement dans la région Asie-Pacifique, de manière à profiter de leur force et de leur solidarité.
* Lutter pour une nouvelle législation sur les droits des femmes qui leur permette d’obtenir la maîtrise des terres et autres ressources naturelles qui, par tradition, ont été du domaine des hommes.
* Se mobiliser pour la protection des droits des femmes que les mines ont déplacées et de celles qui travaillent ou vivent dans des régions minières.
* Combattre contre l’embauche de jeunes filles ou enfants dans les mines.
* Connaître les problèmes et les risques de santé des femmes dans les régions minières et chercher à les résoudre.
* Organiser la Troisième rencontre internationale sur les femmes et les mines (qui aura lieu en Inde en octobre 2004, avec mm&P comme groupe d’accueil).

Le Réseau fait sien le « Pacte pour la Vie », « parce que la terre est notre mère et que les fleuves en sont le lait. La terre est notre vie et notre mort. Ainsi, nous demandons de l’eau pour tous, des puits protégés, des rivières libres de contamination et de déchets, et une terre non dégradée ».

Article basé sur des informations tirées de : « Women and Mining. A resource kit », avril 2003, publié par le Delhi Forum, adresse électronique : delforum@vsnl.com ; « The International Network, Women and Mining – An Appeal for Support », 25 février 2004, site des Mines & Communities, http://www.minesandcommunities.org/Mineral/women6.htm