Articles de bulletin

Il y a quelques années, une photo a fait le tour du monde : elle montrait un Indien dans un petit village au milieu de la forêt amazonienne pointant sa flèche vers l’avion dans lequel se trouvait le photographe. La photo a fait sensation dans la presse internationale parce qu’il s’agissait d’un groupe d’Indiens qui vivait isolé dans la jungle brésilienne, sans contact avec ladite « civilisation ».
En cette deuxième décennie du XXIe siècle, savoir qu’il existe une centaine de tribus isolées sur notre planète est en soi impressionnant. Le simple fait qu’il en existe au moins une témoigne de leur résilience, créativité, autosuffisance et adaptabilité. Peu nombreux et vivant dans des régions éloignées, riches en ressources naturelles et toujours plus convoitées par les gens de l’extérieur, ces peuples sont les plus vulnérables de notre planète.
Il y a un siècle, José Santos Machicado écrivait dans la nouvelle Tres dias en el bosque [Trois jours dans le bois] : « Il n’est pas admissible que les Toromona se privent de pousser les cris qu’ils ont l’habitude de pousser quand ils capturent une proie ou surprennent l’ennemi, et que ces cris n’arrivent pas à une si petite distance du peuple »(1).
Près de 90 % des peuples indiens isolés encore existants vivent dans la région amazonienne, dans des territoires protégés par des barrières géographiques qui tiennent de moins en moins l’homme blanc à distance de leurs forêts, là où les écosystèmes et la biodiversité sont mieux préservés. Ces peuples ont choisi l’isolement pour échapper à un contact qui s’est avéré destructeur dans le passé : soit ils ont été directement confrontés aux Blancs, soit ils l’ont appris indirectement d’autres peuples ‘contactés’.
L’esprit est venu sous les traits du corbeau, m’a emmené là-haut et dit : « Regarde Eami* ce soir. Beaucoup de feux sont allumés. Ce sont les foyers de ton peuple Ayoreo qui éclairent tout ». Nous avons continué à voler et les lumières se sont éteintes, Les unes après les autres. « C’est l’avenir de ton peuple. Les bois s’obscurcissent parce que les Ayoreo n’y vivent déjà plus. Tout devient obscurité » C’est ce que chantait mon grand-père quand j’étais enfant.